Le Sacré-Coeur, une "verrue" construite sur les cadavres des Communards !
Barricade rue de la Bonne, butte Montmartre, durant la Commune de Paris de 1871 (BHVP/Roger-Viollet/Wikimedia Commons/CC)
http://www.toutturpaud.fr/72818119La basilique du Sacré-Coeur a été financée par une souscription publique pour racheter les péchés de La Commune !
Il ne faut pas l'oublier comme il ne faut pas oublier qu'elle est construite sur les cadavres des Communards. C'est un symbole d'humiliation des vainqueurs versaillais sur leurs vaincus.
Le 18 mars 1871 commence "La Semaine Sanglante" qui verra la fin de la Commune dans de trés sanglants affrontements et l'extermination du Mur des Fédérés dans l'enceinte même du cimetère du Père-Lachaise.
Cette basilique a été taguée. Les bien-pensants hurlent à la "profanation". Rue89 publie une tribune de Roland T., 42 ans, professeur d’histoire-géo dans le Val-d’Oise. Le voici :
Qu’est-ce que j’apprends ce mercredi soir à la radio ? Des graffitis anarchistes à l’entrée de la basilique du Sacré-Cœur à Paris ?
« Ni Dieu ni maître ni Etat » ;
« Feu aux chapelles » ;
« A bas toute autorité » ;
« Fuck tourism ».
Qu’est-ce que j’entends dans les commentaires ? TOUS les candidats à la mairie (ainsi que le ministre de l’Intérieur, grand tartuffe des religions dans ce pays) condamnent cette « profanation » (« odieuse » selon Jean-François Copé) ?
Nous ne saurons sans doute jamais qui sont les auteurs de ces actes, sauf si la police se donne des moyens en disproportion du délit incriminé. Je ne le souhaite pas, car j’imagine par avance la sévérité « exemplaire » et hypocrite des sanctions pénales.
Et à quoi bon critiquer « là-bas » les pays qui mettent en prison des chanteuses punks « blasphématoires » si c’est pour faire pareil ici ?
« Profanation ». Tous utilisent ce mot. Pas délit, pas vandalisme, pas dégradation : profanation. Soit un rapport au sacré. Aucun recul, aucune neutralité dans l’exercice d’une fonction publique. Le fait religieux est posé comme une évidence, et pas question de rappeler que si l’action publique organise la libre expression religieuse, elle ne reconnaît rien.
Des communards tués à cet endroit
Maintenant, venons-en au cœur de cette affaire du Sacré-Cœur, celui qu’aucun politique n’a relevé : pourquoi commettre pareil acte à cette date et à cet endroit ?
Le 18 mars 1871, le peuple parisien, assiégé et affamé, se soulève contre l’Assemblée versaillaise, réactionnaire, monarchiste et cléricale. Les Parisiens montent au sommet de la colline de Montmartre, à l’époque dépourvue de cette fameuse basilique, simple vignoble urbain, sur laquelle se trouvent des canons de l’armée. Le peuple s’empare des armes, proclame la Commune, et en appelle au pays pour défendre la « vraie République ».
Nul n’ignore la fin de l’épisode : lors de « la semaine sanglante » (21-28 mai 1871), l’armée de Thiers reprend la ville au prix de 20 000 à 30 000 morts (vous vous rendez compte ? Quasiment le bilan de l’insurrection du ghetto de Varsovie), exécutés à la chaîne et enterrés sous les rues (on retrouvera plusieurs charniers pendant les travaux de percement du métro dans les années 1897-1902).
L’humiliation par l’édification d’une basilique
Avant leurs exécutions, traînés dans la ville sous les crachats des possédants, les Communards étaient contraints de s’agenouiller devant chaque église, chaque croix et chaque image sainte rencontrée. C’est que le peuple parisien était déjà, et de longue date, très profondément anticlérical et largement « athéisé », convaincu depuis plusieurs révolutions (1792, 1848) du rôle réactionnaire du clergé.
Et que fait l’Assemblée versaillaise après la reprise de la ville, après ce triomphe face aux gueux ? Car les morts ne lui suffisent pas. Il faut rééduquer les vivants par la pénitence. Il faut leur imposer « l’ordre moral ». Pour ce faire, est votée une loi qui destine la colline de Montmartre à l’érection d’une basilique. Rien que ça. L’humiliation par l’édification.
Une blessure jamais refermée
Les quartiers populaires sont contraints de taire leurs milliers de morts tandis que, lors du discours d’inauguration du chantier, en 1875, on peut entendre que :
« Cette butte [était] sillonnée par des énergumènes avinés, habitée par une population qui paraissait hostile à toute idée religieuse et que la haine de l’Eglise semblait surtout animer. »
L’anarchisme français est né dans cette blessure jamais refermée au cœur du peuple parisien. De cette obscénité. Car s’il y a profanation, c’est d’abord dans la dissimulation du crime sous cette basilique.
Alors messieurs les politiques, quelques tags à effacer… vous qui faites afficher vos trombines à des milliers d’exemplaires sur TOUS les espaces publics disponibles, souffrez qu’on voit la profanation là où elle se trouve : dans l’existence même de cette basilique à cet endroit.
« Je ne connais pas de non-sens plus imbécile, Paris couronné, dominé par ce temple idolâtre, bâti à la glorification de l’absurde. Une telle impudence, un tel soufflet donné à la raison, après tant de travail, tant de siècles de science et de lutte ! »
Emile Zola (in les 3 Villes, Paris)
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On peut ne pas partager tous les propos contenus dans cette tribune. On peut refuser la manière de traiter un ministre. Mais le fond est ailleurs. Il est dans cette supercherie hypocrite qui consiste à taire les origines de cette basilique, dans la politique d'amnésie sous l'empire de laquelle on évoque cette partie du territoire de Paris où des militants ont été assassinés par des balles françaises sur ordre d'Adolphe Thiers. La véritable vulgarité est là !
OUI, demandons que les candidats du 2° tour des municipales s'engagent à débaptiser les rues qui portent ce nom sanglant !
Gérard Contremoulin
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Sur le site de Marielle-Frédérique Turpaud, maire de la commune libre de Montmartre.(http://www.toutturpaud.fr/72818119)