Strasbourg ou la santé concordataire !
Voilà la dernière conséquence du Concordat : la clinique "tricultuelle" RHENA !
RHENA est le regroupement des trois cliniques privées confessionnelles : ADASSA (clinique juive), DIACONAT (clinique protestante) et SAINTE-ODILE (clinique catholique) ! Voilà ce que l'on pourrait appeler la "laïcité concordataire"...
Le communiqué qui annonce sa création est explicite :
Aujourd'hui, Strasbourg franchit une nouvelle étape dans la consolidation de son offre de "santé" en s'équipant d'un ensemble hospitalier novateur : la clinique Rhéna. Salué par Marisol Touraine, Ministre des Affaires Sociales et de la Santé, comme le fruit "d'une véritable réflexion sur l'organisation du système de santé du futur", et soutenu par l'Agence Régionale de Santé d'Alsace, la Ville et la Communauté Urbaine de Strasbourg, cet aménagement d'envergure ouvrira ses portes au public au premier semestre 2017.
Située sur les berges du Rhin, au coeur d'une zone urbaine en pleine expansion, cette opération est motivée par l'alliance inédite de trois cliniques privées à but non lucratif, confessionnelles, reconnues d'utilité publiques, que sont Adassa (clinique juive), Diaconat (clinique protestante) et Sainte-Odile (clinique catholique).
Les propos de la ministre ne peuvent que plonger les laïques dans la perplexité quant à "l'organisation du système de santé du futur" ! Comment seront conçus les futurs financements des équipements de santé ? Rhéna ouvrirait-elle la perspective de l'entrée des capitaux confessionnels dans les financements de santé ? On avait déjà connu certains déboires avec Georgina Dufoix et son attitude plus que conciliante avec certaines sectes, habituées des équipements de santé et de la fréquentation des patients...
La réduction de la dépense publique correspond-elle dans l'esprit des pouvoirs publics à ce type de passage de relais ? S'agit-il de laisser les capitaux en provenance des cultes suppléer les désengagements de l'Etat ?
Voudrait-on revenir aux sources des soins hospitaliers où Florence Nightingale, la pionnière protestante des soins infirmiers et du métier d'infirmière à partir de la guerre qui opposait (déjà) la Crimée à la Russie en 1853 ?
Quoiqu'il en soit, nous nous éloignons de plus en plus de l'esprit de Séparation qui fonde la République. "Je veux .../... l'église chez elle et l'Etat chez lui" comme le proclamait Victor Hugo dans son discours contre la loi Falloux, c'est l'esprit de notre loi de 1905. Et l'on voit bien ce qu'il en coûte à la République de laisser subsister l'exception concordataire en Alsace-Moselle ! Il est insensé qu'un ministre de la République d'un gouverment de gauche, même social démocrate, apporte son parainnage et laisse l'Agence régionale de Santé apporter son concours à une initiative confessionnelle et présentée comme telle !
Et puis, il est un risque que prend le gouvernement, autrement plus préoccupant dans ce contexte. Cette initiative ouvre la voie aux demandes reconventionnelles des autres cultes non concerné par Rhéna. Or certains de ces cultes présentent néanmoins des revendications très fortes lorsque des patients et plus spécialement des patientes, sont reçues dans les services hospitaliers.
Et puis, enfin comme toujours lorsque l'on est entré dans la logique communautaire confessionnelle, on ignore le fait qu'il existe des femmes et des hommes non croyants, des agnostiques, des athées et de plus en plus.
Rhéna est une initiative extrêmement discutable qui pose sous une forme inattendue la question de la survivance anachronique du Concordat et de ses conséquences sur le pacte social !
Gérard Contremoulin
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Communiqué de Presse RHENA du 12 mars 2014