Une certaine fierté d'être citoyen français et ... franc-maçon !
Non pas d'être seulement d'être français, ce qui aurait un fâcheux relent de chauvinisme, mais fier d'être membre de cette communauté nationale qui a su, à quelques regrettables exceptions près, se mobiliser pour dire NON au terrorisme intégriste et clamer haut et fort son attachement à la liberté d'expression.
Cette communauté nationale, la seule qui puisse exister en République, qui a su démentir la phrase prononcée par les assassins après leurs crimes, "on a tué Charlie". La volonté de riposter à leur projet de terrorisation des citoyens traduite en plusieurs langues : "Même pas peur", "Not afraid", lue sur les pancartes dimanche !
"Même pas peur"
car les assassinés auront bel et bien su "transmettre". Et de quelle manière !
Le numéro 1178 de Charlie Hebdo, le "numéro des survivants", réalise une performance exceptionnelle avec ses 1 puis 3, puis 5, puis 7 millions d'exemplaires imprimés, et en 5 langues !!!
Des files d'attentes devant chaque point de vente, des nuits d'attente dans les voitures, tous les exemplaires vendus avant dix heures et jusqu'à des vols de paquets de 200 exemplaires... Des réapprovisionnements quotidiens prévus pour les quinze jours suivants. Bref une extraordinaire mobilisation juste une semaine après la tuerie et qui semble ne pas faiblir depuis !
Et si l'on se projette dans l'avenir, c'est avec ses plus de 100.000 abonnements enregistrés le 13 janvier et 120.000 le 16 ; c'est un budget qui explose dans sa colonne ... recettes !
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Et maintenant : clarifier.
Il va falloir prendre toute la mesure de cet évènement. Toute la mesure, cela veut dire l'exacte mesure.
On sait maintenant que la tuerie est revendiquée par Al-Qaïda au Yemen. Le moment de cette revendication coïncide avec les critiques portées par des autorités religieuses et les campagnes de haine orchestrées dans des pays qui se revendiquent "musulmans" mais qui ne sont qu'islamistes, l'Iran en tête !
Alors, il va falloir apprendre à distinguer qui est qui dans ce maelström où l'on voudrait nous faire prendre la proie pour l'ombre. Où est réellement l'Islam avec autant d'interprétations du Coran ?
Ce travail de clarification est d'autant plus possible que des intellectuels musulmans nous montrent le chemin.
Par exemple Abdennour Bidar dans sa "Lettre ouverte au monde musulman" qui se termine ainsi :
Cher monde musulman… Je ne suis qu’un philosophe, et comme d’habitude certains diront que le philosophe est un hérétique. Je ne cherche pourtant qu’à faire resplendir à nouveau la lumière – c’est le nom que tu m’as donné qui me le commande, Abdennour, « Serviteur de la Lumière ». Je n’aurais pas été si sévère dans cette lettre si je ne croyais pas en toi. Comme on dit en français, « Qui aime bien châtie bien ». Et au contraire tous ceux qui aujourd’hui ne sont pas assez sévères avec toi – qui veulent faire de toi une victime – tous ceux-là en réalité ne te rendent pas service ! Je crois en toi, je crois en ta contribution à faire demain de notre planète un univers à la fois plus humain et plus spirituel ! Salâm, que la paix soit sur toi.
La lutte idéologique.
Ce qui nous attend désormais, c'est de nous réatteler à la bataille des idées. Il n'est pas de corpus idéologique qui puisse être considéré comme permanent, même s'il est dominant à un instant donné. Une idéologie dominante ne l'est qu'à un moment donné. Ce serait le cas aujourd'hui avec le djihadisme si le 11 janvier et ses cortèges massifs n'étaient venus nous montrer que notre peuple est là, mobilisé pour refuser cette résignation.
Les réactions des populations sous influence des djihadistes à propos de la Une du n° 1178 de Charlie Hebdo ne sont pas à prendre à la légère. Elles démontrent l'énorme décalage de compréhension des mécanismes intellectuels et comportementaux entre elles et nous à propos du principe de Laïcité et de Liberté d'expression.
La liberté d'expression est une liberté encadré par le droit (articles 9 et 11 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen, article 19 de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme et article 29 de la loi de 29 juillet 1881). Sil est interdit de porter la critique sur les personnes physiques ou de tenir des propos insultants ou diffamatoires, ou qui manifesteraient cette intention, cette interdiction s'arrête là et ne concerne ni les idées, ni les philosophies, ni les croyances !
Or, les fondamentalistes considérent que l'objet de la croyance se confond avec la personnalité de celui qui croit. Dès lors, toute attaque de cet "objet" est considéré comme une attaque portée sur eux-mêmes. Il s'agit là d'un amalgame qu'il va falloir s'ingénier à dissiper. Nous ne partons pas de rien. C'était un mécanisme très proche grâce auquel la catholicité a pu soumettre ses ouailles et des pays entiers durant de longs siècles. Nous connaissions dans la France de l'Ancien Régime le principe "cujus Regio, ejus religio" (tel roi, telle religion)..
"Les lois sont encore très impuissantes contre ces accès de rage; c'est comme si vous lisiez un arrêt du conseil à un frénétique. Ces gens-là sont persuadés que l'esprit saint qui les pénètre est au-dessus des lois, que leur enthousiasme est la seule loi qu'ils doivent entendre.
Que répondre à un homme qui vous dit qu'il aime mieux obéir à Dieu qu'aux hommes, et qui, en conséquence, est sûr de mériter le ciel en vous égorgeant ?"
VOLTAIRE, Dictionnaire philosophique, article "fanatisme"... 1764
Et cela s'est arrêté en 1789.
En scandant avec détermination la devise de la République suivie de "Laïcité", les francs-maçons étaient applaudis dans cette marche républicaine, éclatante de sérénité. J'ai même souvent entendu beaucoup de celles et ceux qui s'approchaient de nous pour s'enquérir de qui nous étions avec nos cordons et nos sautoirs, dire "bravo, c'est bien que soyiez là...". Alors, oui, une certaine fierté d'être franc-maçon mais le sentiment d'un grand devoir aussi !
La réaffirmation des principes.
Nous ne pourrons pas faire l'économie d'une bataille de reconquête idéologique sur la réaffirmation des principes de Liberté de Conscience, de Libre Examen, d'émancipation de l'Homme de toutes tutelles. Cette bataille doit se mener sur tous les terrains, à l'école pour commencer, les associations, les entreprises, la culture, les sports. Aucun secteur d'activité ne peut être considéré comme exempt de cette mobilisation !
Cette bataille ne pourra trouver d'efficacité non plus si elle ne prend pas en compte, substantiellement et radicalement, les difficultés économiques que rencontrent les populations des quartiers d'exclusion. Ils constituent le terreau sur lequel s'est développé l'enseignement djihadiste. Car enseignement il y a eu et enseignement il continue d' y avoir. Souvenons-nous des cassettes vidéo de Tariq Ramadan qui circulaient dans les quartiers, sans parler de la part énorme prise par les réseaux sociaux dans ce processus.
L'emploi pour résoudre les difficultés économiques.
La dimanche 11 janvier a montré qu'il était possible de réagir. S'il existe un "esprit du 11 janvier", ce n'est certainement pas celui de la réignation. Alors ne faut-il pas prendre le taureau par les cornes ?
Ne faut-il pas, maintenant, avoir le courage politique de mettre les responsables des entreprises, celles et ceux de qui dépendent les embauches, devant leurs responsabilités dans cette descente aux enfers ? Le temps n'est-il pas venu de réunir les différents partenaires économiques et politiques et mettre bien à plat les difficultés des territoires devant l'emploi ?
Ne peut-on pas trouver des solutions dans un pays comme la France ?
Certes, il faudra très certainement s'attaquer aux égoïsmes, aux prébandes, aux conceptions frileuses de défense des prés carrés et des privilèges. Mais il y a-t-il une autre perspective pour lutter efficacement contre ce fléau ?
Là aussi, il faut étendre l'application du principe d'égalité de traitement des citoyens au domaine de l'emploi !
Il n'y a de communauté que nationale.
Dire cela, c'est réaffirmer que l'Islam n'est pas l'islamisme, qu'être musulman n'est pas synonyme de terroriste, qu'être juif, musulman, chrétien, agnostique ou athée c'est avant tout être français. Que la seule communauté qui génère les mêmes droits et les mêmes devoirs pour tout ses membres, quelles que soient leurs origines, c'est la nation française.
Pour un droit au blasphème !
Lorsque le 1° ministre Manuel Valls proclame à la tribune de l'Assemblée Nationale le 13 janvier que de blasphème ne sera jamais dans le droit national, oublie-t-il l'Alsace-Moselle et les articles 166 et 167 du code pénal en vigueur (dont même les alsaciens mosellans demandaient l'abrogation le 6 janvier dernier) ou annonce-t-il précisément cette abrogation ?
L'avenir nous le dira. Ce serait le moyen de remplir l'engagement du candidat François Hollande, exprimé le 22 novembre 2011 au Grand Orient de France et que l'obédience de la rue Cadet réclame pour en finir une bonne fois !
Aujourd'hui, il est indispensable de s'intéresser à l'action de l'Organisation de la Conférence Islamique (OCI). Elle est au coeur du combat qui vise à restreindre la liberté d'expression et à faire réintroduire la notion de blasphème !
Mais le droit au blasphème traduit aussi la primauté de la loi sur la foi, de la puissance publique sur les clergés, il traduit aussi la supériorité de l'humour et du rire sur le sérieux compassé des bigots en tous genres dans toute l'étendue de leurs variantes. Et les plus extrèmes de ces variantes sont les fondamentalistes de tous poils, de toutes les religions !
Rappelons que le délit de blasphème est sorti de notre horizon lors de la révolution de 1789 et que la loi de juillet 1881 a traduit dans les faits ! Raison de plus pour rattraper le temps perdu dans les territoires concordataires de la République Française !
Juste un acrostiche en hommage à Charlie Hebdo | |||
C’est la France qu’on tue, c’est la Laïcité Honteusement bafouée, c’est notre Humanité Abattue lâchement par d’odieux terroristes Répugnants assassins d’innocents journalistes ! Levons-nous d’un seul corps, car contre la folie Il nous faut réagir afin que nul n’oublie Et grave dans son cœur ces mots : Je suis Charlie. Harmonisons nos voix pour de la Liberté Exalter les valeurs, et par notre Unité Bravons l’obscurantisme ! Il faut les arrêter, Devant le monde entier, ce cri fera écho Obstacle à cette horreur : je suis Charlie Hebdo ! Lina Chelli. Le 7 janvier 2015. |
Gérard Contremoulin
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