RU comme Revenu Universel
La raréfaction du travail, du moins dans la définition que nous en donnons aujourd'hui semble programmée. L'irruption du numérique dans tous les secteurs de notre vie en est l'une des causes structurelles. Certains vont jusqu'à évoquer sa disparition. Quoiqu'il en soit, comment nous préparons-nous à cette "révolution" ?
La question subséquente et néanmoins essentielle est celle du revenu. La disparition ou l'extrême raréfaction du travail entraîne la disparition du salaire comme moyen d'assurer l'existence.
Cette question deviendra l'un des points d'achoppement de tout espoir de progrès social et d'émancipation humaine si une réponse sérieusement crédible ou susceptible de porter un véritable espoir, n'y est apportée. En effet, travail-activité, métier-profession : de quoi parlons-nous ? Quel modèle de société en résulterait ? Comment règlerions-nous les relations sociales ? Quelle fiscalité ? Et que deviendrait la Mutualisation ? Etc.
Déjà présente chez Thomas More dans Utopia, "actualisée" chez Léon Bourgeois avec le Solidarisme, réaffirmée dans les travaux du GODF il y a une dizaine d'années à l'initiative de Yoland Bresson sous la forme du "Revenu d'Existence",
Un débat fondamental.
Aujourd'hui remise au gout du jour dans les conditions que relate cet article de Challenges, l'idée d'un REVENU UNIVERSEL (à ne pas confondre avec son ersatz de revenu minimum, notamment d'insertion) ce sujet engage un débat de fond qui transcende les clivages politiques, au moins en surface.
Le Revenu Universel, un concept "révolutionnaire".
Conçu comme un revenu versé à chaque individu, sur la seule justification qu'il existe, le Revenu Universel décroche la notion de revenu de la notion de travail. Il se conçoit sans aucun rapport avec la production de richesse. Percevoir un revenu sans contrepartie, en fait un concept vraiment "révolutionnaire". Cependant, il va générer à n'en pas douter un buzz électoral dans lequel les débateurs tenteront d'éviter d'en parler alors qu'il est au coeur du dispositif.
Si l'on tire toutes les conséquences de son versement à chaque individu pour la seule raison qu'il existe, il entraine une réelle augmentation du pouvoir d'achat des familles et particulièrement de celles qui sont le plus en difficultés. Par exemple pour un couple avec deux enfants dont seul le père bénificierait actuellement d'une revenu, cette famille aurait droit à quatre fois le revenu universel...
Un défi pour la franc-maçonnerie libérale.
Cette réflexion devrait permettre aux francs-maçons libéraux de reprendre leur place dans l'élaboration des grands projets sociétaux, pour peu qu'ils ne confondent pas les échéances en ne mettant pas la charrue avant les boeufs et surtout, en ne mélangeant pas les genres... En effet, il ne s'agit pas d'élaborer un quelconque programme électoral qui ne pourrait que colmater les brèches d'un système économique et social à bout de souffle mais d'engager une profonde réflexion sur un modèle social à construire pour le moyen terme. Le temps maçonnique n'est pas le temps politique.
Pourtant, le concept de Revenu Universel s'est invité dans le débat de la campagne présidentielle. Et même si elle ne dit pas encore son nom, les arguments qui s'échangent ont déjà la froideur du papier glacé des programmes électoraux. Or, c'est tout le contraire dont ce sujet a besoin.
Déjà tronqué dans le Revenu Minimum d'insertion, amputé de son contenu initialement progressiste, placé entre les mains des élus des conseils départementaux, il est devenu un outil dont le champ d'application s'est réduit à la gestion de la seule dimension de l'insertion sociale. Ce choix d'affectation pose la question républicaine de respect du principe de l'égalité de traitement. Et en matière notamment de solidarité, on observe qu'il y a autant de différences qu'il existe de conseils, chacun ayant sa propre appréciation des réalités...
En Europe également...
Dans l'hexagone avec les élections présidentielle et législatives, mais bien évidemment aussi en Europe, à l'occasion des élections allemandes notamment.
Comment en effet imaginer qu'un dispositif comme celui du Revenu Universel ne puisse exister aujourd'hui qu'en un seul pays en Europe ?
Gérard Contremoulin
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