P comme populisme
Populisme, ce mot sonne bizzarement, comme un ersatz, comme une disqualification. Cela mérite approfondissement...
Le populisme désigne un type de discours et de courants politiques qui fait appel aux intérêts du « peuple » (d’où son nom) et prône à son recours, tout particulièrement en opposant ses intérêts avec ceux de « l'élite »1, qu'il prend pour cible de ses critiques, s’incarnant dans une figure charismatique et soutenu par un parti acquis à ce corpus idéologique2.
Le terme est régulièrement employé dans un sens péjoratif, synonyme de « démagogie ». Dans cette acception, il suppose l'existence d'une démocratie représentative qu’il critique. C'est pourquoi il est apparu avec les démocraties modernes, après avoir connu selon certains historiens une première existence sous la République romaine3,4.
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- Université de Princeton http://wordnetweb.princeton.edu/perl/webwn?s=populism [archive]
- Les Populismes sous la direction de Jean-Pierre Rioux, éditeur : Librairie académique Perrin (18 janvier 2007) (ISBN 978-2262026134)
- Maurice Robin, Histoire comparative des idées politiques, vol.1, Économica, 1988, p. 384
- Laurent Joffrin, Histoire de la Gauche Caviar, Robert Laffont, 2006, chapitre 1 [archive].
Source : wikipédia
Préférer le raccourci.
Le populisme s'appuie sur des pratiques, pas toujours aisées à identifier... Néanmoins, elles procèdent d'un processus de simplification souvent abusive.
On sait depuis Socrate qu'il est toujours plus facile et surtout plus rapide d'aller directement à la conclusion d'un raisonnement que d'en exposer le déroulement, de faire se dérouler les étapes et les mises en question qu'elles permettent et les évolutions qui s'ensuivent. Et particulièrement, les dépassements auxquels tout raisonnement convenablement déroulé peut conduire.
Dans un contexte d'éléments simples, on gagne évidemment du temps et cela peut contenter tout le monde.
Dans un contexte d'éléments complexes, -et la politique, parfois, en est un- le populisme (se) dispense de la réflexion collective. Si cela tombe bien pour le populiste, car son objectif n'est pas de faire appel à la réflexion collective, un problème en revanche se pose, éminemment démocratique, à tout citoyen conscient de ses responsabilités.
Pour un populiste, convaincre ou séduire, il lui faut choisir... Pour un citoyen, ce qui compte, c'est l'information dont il doit disposer pour faire son choix !
Convaincre ou séduire ?
On n'est jamais obliger de substituer l'un à l'autre. Mais la méthode qui consiste à penser par slogan peut accélérer l'adhésion. En campagne électorale, cela peut apparaître comme bon à prendre. Mais ce faisant, cela shunte tout le processus du raisonnement et ne permet donc pas de comprendre les conséquences d'une proposition ou, surtout, d'en mesurer toutes les implications...
C'est là que les francs-maçons devraient pouvoir être en mesure de faire faire appel au Libre-Arbitre citoyen, c'est là que "l'humanisme de combat" devrait pouvoir s'exercer.
Le populisme est un mode de fonctionnement qui privilégie la forme du discours, le plus souvent parlé, sur le fond qui lui, suscite la réflexion et favorise l'esprit critique. C'est moins "performant" voire contreproductif en période électorale... Réfléchir : que de temps perdu !!!
Dans ce contexte, là encore, le franc-maçon se demande où place-t-on l'Homme ? En sujet raisonnant et capable de s'auto-déterminer ou en cible de pure séduction a-citoyenne ?
S'ajoute, en période de crise, un élément supplémentaire, la simplification, souvent extrême, des termes du choix, qui devient binaire : pour ou contre.
Slogans simplistes et arguments chocs.
Les thèmes sur lesquels s'appuient tous les discours populistes ciblent les élites qu'il faudrait éliminer, l'Europe dont il faudrait sortir, l'immigration qu'il faudrait éradiquer pour défendre l'Identité de la "civilisation occidentale", les gaulois qui seraient nos (seuls) ancêtres, etc.
Les dernières élections européennes ont enregistré une montée importante du populisme. Les partis d'extrême droite avancent en s'engouffrant dans les failles de la société. Ces failles, purs produits de la crise, constituent le terreau sur lequel elle prospère dans tous les pays économiquement "développés", ce qui correspond à une catégorie aujourd'hui avérée, des pays en crise...
Cette extrême droite -mais hélas, comme un mouvement constant de l'histoire, pas seulement- s'appuie sur "le peuple", lui tient le discours qu'il souhaite entendre d'une manière d'autant plus simpliste que la question est complexe, pour en attendre un retour (sur investissement) massif en voix...
Mais, sérieusement -et je m'adresse particulièrement aux démocrates- qui peut s'arroger la qualité de parler "au nom du peuple", AVANT un scrutin ?
Cette extrême droite, et ces "populistes", n'ont jamais gouverné d'Etat.
Beppe Grillo et le "Mouvement 5 étoiles" et son "Tutti a casa" ("tous à la maison", souvent traduit par "qu'ils dégagent tous" !), que nous avons déjà entendu en France.
Geert Wilders et le PVV (le Parti de la Liberté, 16%) qui défend tout à la fois un style de vie (qui suppose de lutter contre l'immigration) et son choix de vie (libre choix de son orientation sexuelle), liberté d'expression et laïcité qui suppose l'intolérance vis à vis des autres religions (il milite pour l'interdiction du Coran, qu'il compare au Mein Kampf d'Hitler). Il peut ainsi dénoncer l'islamisation sans dénoncer les musulmans... Ce qui lui donne l'accès aux médias !
Marine Le Pen et le "Front National", ripoliné par Florian Philippot ne serait pas, nous dit-on, en situation de casser le "plafond de verre" qui avait déjà contenu son père sous la barre des 18% (17,79%), soit 5.525.906 voix en 2002. Ce qui suppose, à tout le moins, une sérieuse vigilance...
L'Autriche a fort heureusement réussi à contenir une vague extrémiste qui était aux portes du pouvoir. Mais ne nous y trompons pas, on retrouvera cette poussée lors des prochaines élections législatives qui pourraient, là, faire céder quelques remparts démocratiques.
Sauf la hongrie.
Elle a porté au pouvoir le parti Jobbik, ultra nationaliste, antisémite avec son bras armé et son groupe de motards "identitairement" intitulé les GOI (ce qui désigne les non juifs dans la culture juive).
Les GOI MOTOROS se rendant à un meeting du JOBBIK à Budapest
L'un des députés Jobbik a ouvert une voie en proposant que soit établie une liste ... des juifs !
Virtor Orban, premier ministre, avec son parti le FIDES, accentue encore ce radicalisme d'extreme droite. Ainsi Dieu a été introduit dans la Constitution, les SDF sont considérés comme des criminels et là encore, les droits des femmes reculent et reculent encore...
Et la Turquie.
Recep Tayyip Erdoğan, président de la République de Turquie, qui s'appuie sur le trop pratique "coup d'Etat manqué" de cet été pour pratiquer une purge qui, de jour en jour depuis, s'étend à tous les secteurs d'activité du pays et touche plusieurs centaines de milliers d'officiers, de fonctionnaires, de juges, d'enseignants, de professionnels de santé, etc. ; musèle la presse, interdit des chaines de télévision, des journaux, réprime les journalistes...
Notre futur proche.
Il est en Europe, certes.
Mais il s'installe aussi entre les deux grandes puissances.
La campagne des présidentielles américaines et l'élection de Donald Trump, nous a offert un beau spécimen de cette pratique en politique. Au point que l'enracinement du discours politique de l'adversaire d'Hillary Clinton s'est joué de tous les pronostics. Il a aussi réduit à la portion congru l'espace politique qu'aurait mérité de creuser Bernie Sanders qui développait des orientations et des propositions réellement utiles dans le contexte post Obama...
Et, on me pardonnera cette incongruité, comme il n'est jamais très loin du ridicule, Robert Ménard s'était empressé de l'inviter à Béziers !!!
Le populisme s'attire le "feu de tous bois"...
Est-on d'ailleurs vraiment surpris de voir s'étaler dans les médias, quelques jours avant la prestation de serment du président-élu, des "frasques sexuelles" dont les témoignages filmées, les sex-tapes, seraient entre les mains de Vladimir Poutine, autre belle figure du populisme...
Cet épisode, par lequel Donal Trump aura dû inauguré, bien malgré lui, sa première conférence de presse, témoigne d'une rare pudibonderie et pour tout dire, d'un ridicule achevé.
Mais au delà de la forme, on est en droit de se demander ce que cela vient faire là, en complet décalage avec le contexte de relations internationales en pleine mutation, en plein redistribution des cartes, ce que cela a vocation à dissimuler !
Quand on se remémore le sort que ce pays réserve à ce genre de comportement attribués à des personnages publics, on est en droit de s'inquiéter sur les motivations des "services" et sur leurs projets...
... alors que le sort des grands équilibres se re-dessine.
Dans ce dialogue qui s'ouvre entre les deux anciens acteurs de la "guerre froide", Donald Trump et Vladimir Poutine inaugurent une nouvelle séquence en affichant une volonté de s'affranchir des codes habituels des communications présidentielles et donc, de la diplomatie. Trump mesure-t-il toutes les conséquences de se priver de ce type de filet de sauvetage en cas de tempêtes ? Un nouvel ordre mondial s'érige et de nouvelles règles émergent sans que l'on sache bien encore en mesurer l'impact...
D'autant que les auditions des putatifs ministres du Président-élu auprès des chambres ne cessent de faire apparaître des "distorsions" entre leurs déclarations et celle de Donald Trump.
De quoi se demander qui tire les ficelles...
Accepter de voir ce que l'on voit !
Le journal La Croix propose l'analyse d'Henrik Lindell qui nous livre cinq observations sur le populisme où il étudie le processus qui fait que l'on "ne voit pas ce qu'on voit".
Il examine les situations de la présidentielle de 2002 en France, la montée de Donald Trump, celle de François Fillon lors de la primaire de la droite et du centre, le Brexit...
Le journal produit aussi une série d'articles sur ce thème en posant "5 questions au Populisme". Tout dépendrait, selon Thomas Maissen, de la définition que l'on choisit du "peuple". Les Républiques seraient-elles une alternative au populisme ?
La campagne présidentielle française n'échappe pas à ce qui semble devenu une loi du genre.
Alors que les forces politiques républicaines cèdent ou ont cédé à cette parodie de démocratie que sont ces "primaires", qui ne traduisent en fait que l'impuissance des partis à jouer leur rôle initial, témoignant ainsi de leur inutilité actuelle, on aura remarqué que les candidats qui émergent à gauche sont ceux qui n'y ont pas participé.
Mais l'assourdissant silence de la candidate de l'extrême droite qui attend son heure.
La campagne qui se profile en Allemagne y échappera-t-elle ? On peut en douter.
Son déficit démographique qui s'accélère depuis les années 2000, expliquait en grande partie la position pro-accueil de population de migrants de la chancelière. Mais cette politique (cette "realpolitik") n'est pas acceptée par -choisissons de les nommer- les conservateurs allemands qui la contraignent à un sévère revirement...
Depuis 1972 le solde naturel est négatif, la population allemande ne se renouvelle plus. À partir des années 2000 on constate une accélération de ce phénomène. Source : Wikipédia
Le légitimisme historique du Grand Orient de France est à nouveau en devoir de s'exprimer. Qu'il s'exerce en regard de ses principes et sache rester comme Frédéric Desmons le souhaitait de la Maçonnerie au convent de 1877 :
"une institution ouverte à tous les progrès, à toutes les idées morales et élevées, à toutes les aspirations larges et libérales (...)"
Une Institution qui sache voir clair et comprendre les méandres tactiques politiciens pour les tenir éloignés de ses propres idéaux humanistes qui ne sauraient, en aucune manière, se retrouver liés à la gestion politicienne du quotidien.
La Franc-Maçonnerie majuscule est celle qui se tient en deça de l'arène politicienne pour assurer la préservation des principes humanistes et républicains.
L'époque qui s'ouvre n'est pas pavée que de bonnes intentions...
Gérard Contremoulin
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Gérard Contremoulin
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