Le Président de la République inaugure le 300° anniversaire de la franc-maçonnerie, rue Cadet.
Lundi 27 février 2017, le Président de la République est intervenu au siège du Grand Orient de France. C'est une grande première, qu'il n'a pas manqué de souligner, qu'un Président en exercice prenne la parole au siège de l'obédience tricentenaire...
Le Président de la République a rendu un hommage appuyé à la franc-maçonnerie du Grand Orient de France qui, depuis 3 siècles, a apporté une contribution significative à la construction, à la promotion et à la défense de la République.
Sa présence, historique en tant que telle, a donné un éclairage solennel au lancement des cérémonies qui vont émailler cette année 2017, année du 300° anniversaire de la franc-maçonnerie.
Trois siècles au cours desquels elle a évolué de cette "première" réunion du 24 juin 1717 (dont les historiens de la FM avec Roger Dachez s'accordent pour reconnaître qu'il ne s'est pratiquement rien passé... sauf la consécration de cette date elle-même comme date de naissance de la première obédience maçonnique) jusqu'à la forme dans laquelle nous la connaissons aujourd'hui.
La visite du musée
Le Président de la République a parcouru les vitrines, les cabinets et le mur du temps du musée de la franc-maçonnerie en compagnie des principaux dirigeants de l'obédience et de ses juridictions.
Jacques Oréfice (REAA), Philippe Guglielmi (GCG-RF), Philippe Foussier (1° GMA), Christophe Habas (GM), François Hollande, Pierre Mollier. (Photo Elysée)
Pour la circonstance, Pierre Mollier, le directeur des Archives du GODF et conservateur du musée, qui l'accompagnait dans cette visite privée, avait enrichi les pièces habituellement exposées, de trois véritables trésors, très récemment acquis.
Diplôme maçonnique de la Loge des "Neufs Soeurs", signé de Benjamin Franklin, son Vénérable. (Photo GC)
Labellisé "musée de France", il est tenu d'en honorer les obligations et notamment les détails de son exploitation (acquisitions de pièces, fréquentations, projets,...).
Les pièces exposées ne représentent que 15% des collections détenues !
Il comprend :
- une salle d'exposition permanente qui contient des collections originales et quelques pièces prestigieuses uniques (dont le "Service au 25 symboles")
- et une salle d'exposition temporaire qui accueille actuellement l'exposition sur les 230 ans d'agrégation du Grand Chapitre Général - Rite Français au Grand Orient de France.
Les allocutions.
La grande qualité de l'intervention de Christophe Habas, dont il faut s'habituer à penser qu'il n'a plus que quelques mois pour nous les délivrer (!), mérite en effet la plus grande attention (Sous la Voûte étoilée reviendra prochainement sur le contenu) par rapport à cette période citoyenne, qui ne s'annonce pas sous les meilleurs auspices ! Mais nos règles sont nos règles et ce n'est ni le lieu ni le moment de les fustiger... On peut néanmoins regretter que, élu Grand-Maître dans la troisième année de son deuxième mandat, il devra inexorablement descendre de charge en septembre prochain...
Homme de conviction, Christophe Habas a su présenter au Président de la République un Grand Orient de France exigeant sur les méthodes, ambitieux sur les objectifs, vigilant sur les fondements républicains et résolument laïque sur les principes. Le Président de la République lui en a d'ailleurs donné acte en reconnaissant sa qualité d'orateur...
Le Président de la République s'est livré à un bel exercice, dont il a le secret, de description des objectifs qu'un républicain conséquent se doit de défendre. Et s'il a toutefois reconnu que ses réalisations "ne sont pas allées jusqu'au point où vous l'auriez souhaité" , c'était pour ajouter qu'il s'agissait là pour les francs-maçons d'une incitation "à réfléchir encore et de faire en sorte que la législation progresse"...
Il n'est pas douteux, que nous suivrons ce conseil, particulièrement sur la constitutionnalisation des principes de la loi du 9 décembre 1905, même s'il nous a assuré qu'à chaque fois qu'on lui avait proposé de la modifier, il avait invariablement répondu "qu'il suffisait d'appliquer strictement, fermement l'esprit des lois et la lettre de la loi de 1905."
Et puis, point d'orgue de cette allocution :
Vous avez fait en sorte que la République puisse être ce qu'elle est aujourd'hui et c'est le sens de ma présence qui est simplement une démarche de reconnaissance pour ce qui a été apporté, génération après génération, pas seulement vous mais aussi par vous. La République croit au progrès. Elle croit à l'amélioration de la condition humaine. Elle pense que le progrès personnel vient aussi alimenter le progrès dans la société et c'est cette espérance que vous portez depuis trois siècles : une société plus juste, une volonté de bâtir un monde plus fraternel.
Ce moment s'est achevé par le traditionnel échange de cadeaux.
Le Grand-Maître devait remettre au Président la version "médaillon" de la Marianne de Jacques France et le Président, la médaille de la Présidence de la République.
Un moment singulier.
Son originalité en fait un temps tout à fait particulier de l'histoire du Grand Orient de France mais aussi de celle de la Présidence de la République.
Témoignage solennel de l'attachement de l'obédience à la République, à ses principes au premier rang desquels la Laïcité, et à son projet social que symbolise sa devise qui est aussi celle de la franc-maçonnerie.
Témoignage de reconnaissance du chef de l'Etat du rôle joué par la franc-maçonnerie dans l'élaboration et la maturation des grandes idées-clés qui ont structuré notre société. Reconnaissance aussi du rôle joué pendant les périodes noires de notre pays par les francs-maçons. Si le Président de la République avait tenu à "panthéoniser" notre Frère Jean Zay, il devait rendre hommage à ceux des nôtres qui n'ont pas compté leurs efforts pour défendre sa "candidature", Jean-Michel Quillardet durant sa Grande-Maîtrise et Avelino Vallé, artisans infatigables de la défense du dossier auprès du Chef de l'Etat et de ses services.
Jean-Michel Quillardet, Avelino Vallé, Gérard Cazobon, François Hollande, Christophe Habas. (Photo Elysée)
La défense des principes républicains, au coeur de leurs propos, l'était aussi dans celui de chaque participant, Grand-Maîtres et Grande Maîtresse en exercice, anciens Grands-Maîtres, conseillers de l'ordre, anciens et en exercice, dirigeants des juridictions de Hauts Grades, blogueurs et journalistes accrédités.
Moment singulier dont chacun mesurait que l'éphémèrité des mandats de chacun des deux protagonistes en en excluant tout enjeu, lui conférait une belle authenticité.
Gérard Contremoulin
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