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Le Blog pour Tous d'un franc-maçon. "La loi morale au fond de notre coeur et la voute étoilée au dessus de notre tête". Emmanuel Kant Les pseudonymes ne sont plus acceptés pour les commentaires. (4.11.2018)

14 May

Jeu de mots 4 : Responsabilité

Publié par Sous la Voûte étoilée  - Catégories :  #Dico, #Réflexions

Jeu de mots 4 : Responsabilité

Notre vie citoyenne devient erratique. Tout se passe comme si la première caractéristique du citoyen était de recevoir ce qu'il considère comme son dû plutôt que d'apporter son écot à la vie nationale. 

 

 

 

Résonne alors la phrase prononcée par John Fitzgerald Kennedy dans son allocution d'investiture :

 

"Ask not what your country can do for you, ask what you can do for your country"

(Ne demandez pas ce que votre pays est prêt à faire pour vous, demandez ce que vous êtes prêt à faire pour votre pays).

 

Considéré comme le discours d'investiture le plus fort des présidents des Etats-Unis, l'orientation exprimée ici est essentiellement citoyenne, "républicaine". Mais ce concept politique prenant une autre signification politique aux USA, ce serait un contre-sens, Kennedy étant démocrate.

Jeu de mots 4 : Responsabilité

Elle prend en référence "l'ardente obligation" de s'engager et de prendre sa part dans le processus de la vie sociale.

 

Cet engagement n'est pas une option. Il repose sur la raison fondamentale que l'homme est un être social et doit assumer cette condition. Dans la chaine de l'Evolution, l'engagement s'est construit chez l'homme avec sa faculté de raisonner. Pour (sur)vivre, il doit agir, il doit s'engager. 

Dans cette perspective, on peut alors se demander si l'homme pourrait ne pas agir et rester indifférent à tout engagement. J'ai indiqué dans un article de la revue "Le Maillon de la Chaine Maçonnique" (de septembre 2018) : Pourquoi faire quelque chose plutôt que rien, qu'il s'agit d'une question éthique. 

 

Blaise Pascal formule cette "pensée" que :  

 

Tout le malheur des hommes vient d'une seule chose, qui est de ne savoir pas demeurer en repos, dans une chambre.

 

Savoir rester au repos dans une chambre serait donc le viatique du bonheur. A moins de faire voeu d'ascétisme, telle les ermites ou de retrait du monde, telles les vies monastiques, le lot commun des êtres humains est d'être en mouvement dans la société.

 

Même, l'homme agit dans la perspective d'améliorer son sort et celui de ses congénères. Il agit et ses actes produisent des conséquences dont il est responsable. 

 

Responsabilité.

 

Le dictionnaire de l'Académie Française établit trois domaines de responsabilité :

 

C'est l'obligation de répondre de ses actions ou de celles des autres, d'être garant de quelque chose.

 

La responsabilité des ministres, La responsabilité ministérielle. La responsabilité des magistrats.

 

Responsabilité morale. Celle qui est considérée du point de vue de la loi morale.

 

Responsabilité civile. Celle qui est considérée du point de vue des dommages qu'une action a pu causer.


 

Le Littré ajoute la dimension médicale :

  •  

    Responsabilité médicale, degré de responsabilité que peuvent encourir les médecins envers les particuliers ou le public, à l'occasion de l'exercice de leur profession.

 

Le Code Civil institue une règle de droit avec l'article 1382 :

 

Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer.

 

Rédigé en 1804, il a été maintenu en l'état et porte dans le nouveau code civil (1°.10.2016) le numéro 1240. Il énonce, dans une rédaction jugée "parfaite", une règle de droit fondamentale qui s'applique encore aujourd'hui : l'homme doit répondre de ses actes.

 

 

Le Larousse précise en effet la dimension de l'action :

 

Fonction, position qui donne des pouvoirs de décision, mais implique que l'on en rende compte (surtout pluriel) :

Avoir des responsabilités dans un syndicat.

 

 

Jean-Paul Sartre élargit le champ de l'acte et de la responsabilité qui en découle en émettant cette règle que :

 

 

 

L'on est toujours responsable de ce que l'on n'essaie pas d'empêcher.

 

 

 

 

C'est prendre en référence "l'ardente obligation" de s'engager et de prendre sa part dans le processus de la vie sociale. Cette part embrasse l'ensemble du prisme de la vie civique, de l'engagement citoyen et donc politique.

 

L'actuelle Constitution en son article 4, 1° alinéa, les reconnait :

 

Les partis et groupements politiques concourent à l'expression du suffrage. Ils se forment et exercent leur activité librement. Ils doivent respecter les principes de la souveraineté nationale et de la démocratie.

 

Ce qu'il est convenu d'appeler "les forces vives de la Nation", les partis politiques, les syndicats (reconnus depuis 1884, loi Waldeck-Rousseau) et les grands mouvements associatifs exercent leurs activités et contribuent à la vie sociale du pays.

 

Dans cette perspective, certaines distorsions peuvent surprendre. Les incohérences de la pensée amène l'inconséquence des actes.

 

Etonnements.

Il est étonnant que ceux qui dénonçaient l'omniprésence de l'Etat et son interventionnisme dans leurs affaires, qui militaient pour le toujours-moins-d'Etat, le toujours-moins-de-Service-Public et pour la baisse massive des impôts soient ceux qui aujourd'hui, réclament le retour de l'Etat-Providence. 

 

Il est étonnant à plus d'un titre que les critiques de ce quinquennat s'appuient sur Paul Ricoeur et son concept de "faits de mal gouvernance".

 

La responsabilité politique peut-elle être évoquée au même titre que la responsabilité civile ou la responsabilité pénale ? Si l'une et l'autre s'appuient sur des codes spécifiques pour juger de la responsabilité d'un fait, pour juger de la bonne ou de la mauvaise gouvernance, il n'existe pas d'équivalent au Code Civil ou au Code Pénal. Il n'existe effectivement pas de "Code Politique". Le seul qui existe en la matière est le chapitre des élections, partie spécifique du Code Administratif.

 

Or la pression est forte pour faire glisser la responsabilité politique au niveau pénal ou pire en matière de justice et de droit, au niveau médiatique. Lequel s'est "enrichi" des réseaux sociaux et a réhabilité la pratique du pilori.

 

En effet,  faute de faire confiance au vote, qui est pourtant l'exercice premier de la démocratie et le seul "juge" de l'exercice d'un mandat politique, on se dirige vers l'instance judiciaire (les tribunaux) plutôt qu'à l'instance politique (le parlement). Plus de soixante plaintes sont déposées contre des ministres, principalement le Premier ministre, le ministre de la Santé et celui de l'Intérieur.

 

Il est étonnant d'observer la différence d'attitude entre les personnels soignants qui ont pris d'énormes risques personnels en affrontant le Covid-19 et les enseignants qui, dans la perspective du 11 mai, protestaient qu'on les envoyaient à l'abattoir, menaçaient de faire valoir leur "droit de retrait" ou encore, si les conditions n'en étaient pas réunies, de faire grève...

 

 

L'engagement citoyen serait-il devenu désuet ?

Les institutions républicaines se caractérisent par le système de la séparation des pouvoirs que les cinq constitutions ont fait vivre, même si les modalités ont parfois été assez différentes.  La Justice se rend "au nom du peuple français", le législatif repose sur le modèle de la démocratie représentative et l'exécutif est responsable devant le parlement. La 5° République a institué un Président uniquement responsable devant le peuple à l'issue de son mandat.

 

La démocratie représentative.

Ce système repose sur la constitution de deux groupes distincts, les mandants (les citoyens) et leurs mandataires (les élus).

 

Les évolutions de la société, notamment dans le domaine de la communication, ont complexifié les mécanismes institutionnels. Elles ont généré de graves dysfonctionnements et les réseaux sociaux ont transformé la nature de la relation entre les citoyens, les élus et le pouvoir exécutif en une relation de défiance. De graves tensions sont apparues au fil des politiques des gouvernements, les oppositions se sont radicalisées. Le lien social s'est fracturé.  

 

Au point que seule semble compter désormais la dépréciation de l'adversaire, par tous les moyens. Plus rien ne semble compter que la condamnation sans appel, d'autant plus définitive qu'elle n'est évidemment pas argumentée.

 

Et si l'on prête une oreille attentive aux discours qui se tiennent autour de nous, on n'entend qu'arguments visant à stigmatiser l'échec des autres, qu'ils soient gouvernants, patrons, syndicats, voisins, etc.

 

 

Préparer un nouveau Contrat Social. 

Nous sommes probablement à un moment crucial de notre histoire où l'homme pourrait échouer dans la transmission des principes qui l'ont institué dans le statut de citoyen responsable. L'histoire nous livre maints exemples où la fuite des responsabilités collectives citoyennes, où le fait de s'exonérer de toute responsabilité individuelle, nous ont précipité dans l'autoritarisme des régimes funestes pour les libertés. 

 

Le démarrage du processus de déconfinement devrait engager également un processus d'élaboration d'un nouveau contrat social, un Pacte qui réussisse à reconstituer l'union des citoyens vers une unité des valeurs, vers un dessein commun.

 

Jeu de mots 4 : Responsabilité

Cette entreprise est vaste, compte-tenu des déchirements que nous connaissons aujourd'hui ; compte-tenu des rancoeurs haineuses qui se sont accumulées autour de rivalités d'égos. Il faudra réussir à dépasser ce lourd handicap.

 

Tracer les grands axes.

La crise sanitaire a souligné les fonctions vitales du pays et mis en évidence les carences de nos sociétés. Nous prenons conscience de la nécessité de redéfinir un dessein pour le pays, de replacer ces fonctions dans une grande cohérence qui répondent aux aspirations et qui en assure l'épanouissement.

 

Le nouveau Pacte social doit tracer les grands axes autour desquels bâtir la société de l'après confinement. Il doit redéfinir les rôles respectifs de l'Etat, des collectivités publiques et des acteurs privés autour d'un projet social où l'homme reprend sa place de mesure de toute chose. 

 

L'homme mesure de toute chose aujourd'hui, ce serait :

 

Appliquer l'égalité en droit de tous les êtres humains où qu'ils soient et d'assurer le respect de ce droit ;

 

Assurer un égal accès de tous aux services publics où que l'on soit sur le territoire ;

 

Garantir les fonctions vitales de la société et leur assurer les moyens nécessaires en matière d'éducation, de santé, de recherche, de transports, d'approvisionnement, de nutrition, de logement ;

 

Assurer le développement intellectuel, culturel et artistique des citoyens ; 

 

Faire prévaloir la défense de l'environnement et des ressources de la planète dans tout projet économique de développement ;

 

Remettre l'économie au service du projet politique et non l'inverse.

 

 

Eviter la sensiblerie.

 

La crise a également révélé l'importance du rôle joué par les personnes qui ont assumé le contact avec les personnes vulnérables et surtout les risques qu'elles ont encourus. Cette fonction est apparue comme vitale, malgré des moyens extrêmement limités, particulièrement dans le réseau associatif qui a pu, heureusement, bénéficier d'engagements bénévoles.

 

Il est consternant que certains élus considèrent que la remise de la Légion d'Honneur et l'invitation à participer au défilé du 14 juillet soient à la hauteur de la réponse que le pays doit apporter.

 

 

Réhabiliter la notion de progrès.

 

Certains travaillent depuis quelques années à faire monter une vague régressive visant l'anéantissement du concept de progrès. Ici ou là, ils s'allient avec ce que l'intelligentsia compte de réactionnaires, de négationnistes, d'essentialistes, de communautaristes pour nier la philosophie des Lumières.

 

Cette vague n'a malheureusement pas épargné la Franc-Maçonnerie. Les colonnes de certaines Tenues Blanches Ouvertes en résonnaient encore à la veille du confinement. 

 

La notion de progrès est au coeur de la philosophie des Lumières. Elle fonde la volonté de chercher, de découvrir pour connaître. La réhabiliter comme vecteur de recherche et de développement des connaissances est nécessaire pour dissiper les obscurantismes, déjouer les biais cognitifs.   

 

Elle repose sur l'exercice du Libre Arbitre. Cette pratique de la raison en acte permet à l'homme de repousser les préjugés, les dogmatismes, les réflexions inachevées, court-circuitées ou polluées par ses avatars que sont les fake-news, les "alternative facts" ou les récits complotistes. 

Quels qu'aient pu être nos engagements antérieurs, nous devons nous y consacrer pour mettre à jour nos analyses, aider à la compréhension des mouvements à l'oeuvre dans la société, faire émerger un "Après".

 

Le passeur de témoin transmet, partage des expériences pour que les principaux concernés puissent décider de leur avenir.

 

 

Telle est notre responsabilité.

 

 

Gérard Contremoulin

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