Réfléchir par temps de Covid (3) : le souffle de la démocratie, du XVIII° au XXI° siècles autour de l'Atlantique.
Esprit critique, liberté de conscience, savoir vivre et penser librement, restent après trois siècles, des objectifs majeurs toujours à atteindre !
Plusieurs évènements majeurs dans notre vie citoyenne internationale témoignent de son importance à travers les siècles.
La Déclaration d'Indépendance.
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Les treize états de la cote Est, colonies britanniques, se séparent de la Couronne. La démocratie américaine naissante adopte sa Déclaration d'indépendance le 4 juillet 1776. Le texte est largement inspiré par les principes de la philosophie des Lumières (notamment les droits naturels et politiques des hommes). La version votée est rédigée par Thomas Jefferson. (Voir ici les différents participants).
La Constitution des Etats Unis d'Amérique.
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Le 17 septembre 1787, cinquante-six délégués adoptent et signent la Constitution qui commencent par ces mots "We, the People".
Elle instaure un état fédéral. Elle est encore en vigueur aujourd'hui.
Les pères fondateurs réunis pour la signature de la Constitution des États-Unis (Howard Chandler Christy).
Deux ans et dix jours plus tard, la Bastille "tombera".
La Déclaration des Droits (The Bill of Rights).
Des "amendements" interviendront ultérieurement sans en modifier les bases.
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Les dix premiers forment la Déclaration des Droits des Etats-Unis (United States Bill of Rights), adoptés en septembre 1789 par le congrès.
Liens entre francs-maçons américains et français.
Parmi les sept pères fondateurs principaux de l'indépendance américaine, on comptera quatre francs-maçons : Benjamin Franklin, Alexander Hamilton, James Madison, Georges Washington. Leurs liens avec la franc-maçonnerie française étaient étroits. Georges Washington et Benjamin Franklin fréquentaient la loge des "Neuf Soeurs" dont ce dernier sera Vénérable entre 1779 et 1781. Quant à Thomas Jefferson, il n'est pas certifié qu'il le fut mais il était très entouré maçonniquement.
Lors de la bataille de Yorktown, le 19 octobre 1781, qui fut décisive dans la guerre d'indépendance contre les anglais, les combattants français sont commandés par La Fayette, Rochambeau et La Rouerie, francs-maçons.
Isolationnisme.
Les liens humanistes entre les deux bords de l'Atlantique ne se sont pas démentis dans les moments difficiles, même s'il aura fallu contourner voire vaincre un isolationnisme quasi réflexe, toujours latent.
Il est responsable, notamment, de l'entrée tardive des USA dans les deux conflits mondiaux. Les perspectives de développement économiques devaient trouver tout leur espace dans l'exercice de la solidarité humaine internationale. C'est ainsi que le New deal a précédé le plan Marshall. A chaque époque sa dimension.
Sans compter cette déclaration tout à fait essentielle du "Brother" Winston Churchill au Général De Gaulle : "entre l'Europe et le Grand Large, nous choisirons toujours le Grand Large". Retour paradoxal sur la déclaration d'indépendance ? Quoiqu'il en soit, ces propos sonnent aujourd'hui avec une résonance particulière. Est-ce la marque d'une identité de cheminement de Winston Churchill à Boris Johnson, les deux Premiers ministres qui bornent actuellement le règne de Sa Gracieuse Majesté ?
A propos du 25° amendement du 23 février 1967.
Cet amendement, dont il est beaucoup question depuis l'acte séditieux du Capitole, concerne le remplacement du Président des USA par le Vice-Président dans des circonstances très précises.
L'actualité vise plus spécialement la section 4, qui stipule :
" Si le vice-président, ainsi qu'une majorité des principaux fonctionnaires des départements exécutifs ou de tel autre organisme désigné par une loi promulguée par le Congrès, font parvenir au président pro tempore du Sénat et au président de la Chambre des représentants une déclaration écrite les avisant que le président est dans l'incapacité d'exercer les pouvoirs et de remplir les devoirs de sa charge, le vice-président assumera immédiatement ces fonctions en qualité de président par intérim. Par la suite, si le président fait parvenir au président pro tempore du Sénat et au président de la Chambre des représentants une déclaration écrite les informant qu'aucune incapacité n'existe, il reprendra ses fonctions, à moins que le vice-président et une majorité des principaux fonctionnaires des départements exécutifs ou de tel autre organisme désigné par une loi promulguée par le Congrès ne fassent parvenir dans les quatre jours au président pro temporedu Sénat et au président de la Chambre des représentants une déclaration écrite affirmant que le président est incapable d'exercer les pouvoirs et de remplir les devoirs de sa charge. Le Congrès devra alors prendre une décision ; s'il ne siège pas, il se réunira dans ce but dans un délai de 48 heures. Si, dans les 21 jours qui suivront la réception par le Congrès de cette dernière déclaration écrite, ou dans les 21 jours qui suivront la date de la réunion du Congrès, si le Congrès n'est pas en session, ce dernier décide par un vote des deux tiers des deux Chambres que le président est incapable d'exercer les pouvoirs et de remplir les devoirs de sa charge, le vice-président continuera à exercer ces fonctions en qualité de président par intérim ; dans le cas contraire, le président reprendra l'exercice desdites fonctions. »
Le contexte de son adoption.
Au delà des personnes et des sympathies ou antipathies qu'elles peuvent engendrer, on comprend les raisons d'adoption de ce texte. Elles font suite à la situation de santé du président Woodrow Wilson, élu pour deux mandats en 1913 et 1917.
Il était favorable à la Société des nations, défavorable aux sanctions imposées à l'Allemagne dans le traité de Versailles, opposé à l'isolationnisme mais favorable au racisme anti afro-américains. Sa déclaration nettement favorable au Ku Klux Klan figure dans le film "Naissance d'une Nation" de D.W. Griffith.
Il fut victime d'une attaque cérébrale en 1919. Son épouse, Edith, mit en place le "gouvernement de chevet" où elle filtrait les dossiers et jugeait de l'opportunité de les lui soumettre aux rares moments où il pouvait intellectuellement exercer ses pouvoirs.
Deux orientations.
Il n'est pas question, ici, de retracer l'histoire des USA, ni même de dresser un tableau clinique des présidences. En revanche, on peut noter la permanence de deux tendances lourdes de la vie politique américaine que l'on semble identifier actuellement. L'orientation isolationniste qui privilégie les politiques bilatérales au niveau international et une orientation plus ouverte, multilatéraliste, qui place les USA comme partenaires des politiques étrangères des pays, notamment européens. Pour éviter une approche mécaniste, il faut souligner la dimension économique qui est l'épine dorsale de ces choix.
Un slogan traduit la première de ces orientations.
Make America great again.
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Le slogan "Make America Great Again" utilisé par Ronald Reagan en 1980, répondait à la situation de chômage important de la fin des années 1970.
Bil Clinton le reprendra lors des primaires démocrates pour l'élection de 1992. Il y précise "en matière d'économie, d'éducation et de social".
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Donal Trump en 2016, en fera un gimmick de campagne en référence à Reagan. Il l'utilisera tout au long de son mandat. Et, au delà du simple détail, on remarquera que dans son discours d'investiture au Capitole, le 20 janvier 2017, il remplacera "great" par "strong".
Aujourd'hui,
La résistance du système institutionnel américain face à la tentative de sédition trumpiste de ces dernières jours, montre la solidité du système des institutions républicaines américaines. Elle montre aussi - et c'est d'une grande gravité - comment ces institutions, ô combien historiques pour nous francs-maçons français, sont exposées aux populismes, aux mensonges, aux truquages de toutes sortes.
Une règle, celle des faits alternatifs (alternative facts), pourrait s'imposer. Cette manière "alternative" de présenter les faits, surréaliste, justifiant le mensonge, a été initialisée durant le mandat de Donald Trump. Il serait bon que les francs-maçons sachent en mesurer toutes les conséquences et sachent raison garder.
Les 7 jours qui nous séparent de l'investiture du Président Jo Biden peuvent être le théâtre de barouds "d'honneur" des trumpistes. Le FBI publie des synthèses alarmistes, la Garde Nationale est mobilisée, la gouverneure démocrate de Washington DC invite la population à une participation "virtuelle" à la cérémonie. Bref, la "sortie" de Trump, même s'il en est absent, fait peser un nouvel épisode des adversaires de la démocratie...
L'irruption quotidienne, dans la vie nationale française de la gestion de la Covid, et plus particulièrement maintenant avec la campagne de vaccination ; ces oppositions diverses, antivaxe notamment, flirte avec l'irrationnel et avec le complotisme.
Démocratie / Populistes.
On aura beau jeu de montrer les images de ces pauvres trumpistes, communautaristes, "Qanonistes", occuper les locaux du Sénat américain et déclarer qu'ils veulent "reprendre" ce lieu de la démocratie, confisqués par "eux", traduisez les élus (excusez du peu !) !...
On entendra les revendications du QAnon Jake Angeli, porteur d'un éblouissant trophée... On déplorera la mort de la militante libertarienne Ashli Babbitt, de trois autres militants trumpistes et d'un policier.
Mais, et c'est un grand étonnement, le dispositif mis en place par le service de sécurité du Sénat, celui-là même qui avait été mis en place pour prévenir les conséquences de la manifestations des "Black Lives Matter", aura été "submergé" ! Comme c'est étrange... Certes, les médias rendent aujourd'hui hommage à Eugêne Goodman, cet ancien GI qui a su jouer le l'impréparation des insurgés.
Mais il faudra que les responsables des quelques quinze services de sécurité présents à Washington DC rendent compte de la désorganisation qui a conduit à ce prétendu "débordement".
Il faudra aussi que toutes les démocraties se prémunissent contre ce risque de sédition. Ce qu'il est convenu de nommer désormais le "trumpisme" n'est pas éteint aux USA et n'est exclusif des USA. Il peut faire des émules. Les slogans "America first" ou "Make America great again" sont aisément adaptables à certaines réalités nationalistes tant ils cousinent les "les français d'abord" ou "la France aux français"
La France connaît.
La France se souvient des évènements du 7 février 1934, où les militants d'extrême droite, Croix de Feu du Colonel de La Rocque, et au delà, les militants anti Front Populaire qui se rassemblaient autour du slogan "Mieux vaut Hitler que le Front Populaire" s'étaient rassemblés place de la Concorde à quelquescentaines de mètres de l'Assemblée Nationale.
La France, les démocraties sont-elle vaccinées contre ce type d'allégation ?
Cavaliers de la garde républicaine mobile contre émeutiers sur la place de la Concorde le 7 février.
Le 22 avril 1961 au lendemain du putsch des généraux, manqué
Les signaux envoyés.
Les images en provenance du Capitole, haut lieu de l'histoire et de la démocratie américaine, bafouées par les symboles racistes dont le drapeau confédéré des sudistes de la guerre de Sécession, imposent la réflexion. Le populisme peut-il venir menacer par les armes, l'idée même de la démocratie ? Cette question ouvre la voie à toutes les hypothèses.
Cet épisode, honteux, donnent aux adversaires de la démocratie, dignitaires iraniens, chinois, dynasties du Golfe, tout le loisir de railler la démocratie.
Mais le départ de Trump de la Maison Blanche ne tire pas un trait sur le trumpisme, tant sur le plan intérieur (ici, ici, ici) que sur le plan international (ici). La Capitole a révélé au grand jour certaines des forces structurées qui ont permis son élection en 2016.
Les 7 jours qui nous séparent de l'investiture du Président Jo Biden peuvent être le théâtre de barouds "d'honneur" des trumpistes. Le FBI publie des synthèses alarmistes, la Garde Nationale est mobilisée, la gouverneure démocrate de Washington DC invite la population à une participation "virtuelle" à la cérémonie. Bref, la "sortie" de Trump, même s'il en est absent, fait peser un nouvel épisode des adversaires de la démocratie...
Quelles en seront les conséquences sur la démocratie ! Ceux qui l'ont aidé (notamment les réseaux sociaux, y compris ceux qui viennent de le censurer) ont aussi leur part...
A nous de savoir cheminer au milieu des pièges numériques, sociaux, sanitaires, entre les fake news, à partir de nos propres biais cognitifs.
Avec une attention particulière à porter sur le conseil que la Statue de la Liberté donne à Marianne.
L'heure du repos.....
Gérard Contremoulin
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