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Le Blog pour Tous d'un franc-maçon. "La loi morale au fond de notre coeur et la voute étoilée au dessus de notre tête". Emmanuel Kant Les pseudonymes ne sont plus acceptés pour les commentaires. (4.11.2018)

19 Jan

Amélie Oudéa-Castera : Pourquoi ?

Publié par Gérard Contremoulin  - Catégories :  #Laïcité - Religions

Amélie Oudéa-Castéra était très certainement une tenniswoman au parcours prometteur, bien qu'elle ait choisi d'abandonner très tôt (1996, elle a 18 ans) une carrière professionnelle pour se consacrer à la Fédération Française de Tennis (FFT).

Ici avec Amélie Mauresmo
Ici avec Amélie Mauresmo

Ici avec Amélie Mauresmo

Sa carrière ministérielle prendrait-elle une tournure similaire ? Elle semble s'y appliquer. Alors que son parcours en vue des JOP de l'été semblait se dérouler sans (trop) de turbulences dans un ministère quasi "sur mesure", la voilà promue rue de Grenelle, avec  un périmètre ministèriel qui ferait rougir bien des héritiers de Ferry (Jules)...

 

Mais... 

 

Le 12 janvier, voilà qu'elle se tire un missile dans le pied avec des propos qui soulèvent une polémique et son lot de boules puantes. "C'est curieux ce besoin des sportifs de faire des phrases !" aurait pu s'étonner Maitre Folas...

 

Faire la promotion de l'enseignement privé, particulièrement de l'école Stanislas, en vomissant sur l'enseignement public, l'école Littré, sur la base de faits démentis par les intéressés, est surréaliste. Depuis le "mammouth" du regrettable Claude Allègre ("c'est curieux ce besoin des scientifiques ..."), jamais ministre n'avait tiré ainsi sur son propre ministère !

 

On imagine l'effroi tant à l'Elysée (la ministre est de la même promotion de l'ENA que le président, qu'elle tutoierait) qu'à Matignon ! Amélie Oudéa-Castéra (dont les initiales forment une curieuse AOC) a du être sommée de réagir et de présenter des excuses. Ce qu'elle a entrepris de faire en protestant de sa bonne foi. Mais sans beaucoup de résultats tant l'agression est insupportable pour les enseignants qui s'estiment - à juste titre - dénigrés.

Amélie Oudéa-Castera : Pourquoi ?

La teneur de ses propos, toute empreinte du pardon de la faute qui absout et de charité chrétienne censée grandir, illustre le décalage entre deux conceptions de l'éducation : confessionnelle ou laïque.

 

La teneur de ses propos, toute empreinte du pardon de la faute qui absout et de charité chrétienne censée grandir, illustre le décalage entre deux conceptions de l'éducation : confessionnelle ou laïque.

 

Et la "pluralité de modèles" dont la ministre justifie l'existence pour des raisons d'opportunités ponctuelles, est une pure violation du principe républicain d'égalité d'accès au service public.  

Amélie Oudéa-Castera : Pourquoi ?

 

Le système scolaire français n'a pas été conçu pour être un système duel, partagé. Il l'est devenu par une intense bataille idéologique, une "guerre scolaire" déclenchée par le clergé catholique contre l'Etat. Le rapport de forces qui la sous-tend n'a en fait jamais cessé depuis l'adoption de la loi du 9 décembre 1905. Avec elle, le clergé catholique a été dépossédé de l'enseignement et du contrôle sur la formation des jeunes consciences. 

 

Fort de cette réalité, la loi de Séparation interdit de faire l'apologie ou d'enseigner telle ou telle religion. Elle recommande la neutralité tant des personnels que de l'Etat lui-même. "L'église chez elle et l'état chez lui" proclamait déjà Victor Hugo à la tribune de l'Assemblée Nationale (14 janvier 1850, la veille de la promulgation de la loi Falloux).

 

Il se pose comme le moyen pour que s'applique le principe républicain de formation de l'esprit critique de tous les enfants en ce qu'ils sont des citoyens en devenir. C'est à ce titre que l'Etat doit en assumer le fonctionnement et en contrôler l'exécution. Un ministère est chargé de cette responsabilité dans le respect de la loi.

 

Ce sont les trois lois majeures de Jules Ferry (1881 et 1882) et la loi du 9 décembre 1905 sur la Séparation. Ces lois instituent l'obligation de l'instruction, la gratuité scolaire, et celle de 1905 institue le principe de la Séparation entre la religion catholique, qui exerçait jusque-là la direction de toutes les écoles françaises, et un système scolaire nouveau, strictement déconfessionnalisé. On se rappellera que l'école privée Stanislas a été fondée en 1804, par des ecclésiastiques comme une "maison d’éducation chrétienne de garçons" (selon les termes de présentation de l'établissement).

 

Depuis, les gouvernements conservateurs ont enchainés les dispositifs législatifs et réglementaires visant à restaurer le dualisme scolaire créé par la loi Falloux du 11 janvier 1850. La loi Debré du 31 décembre 1959 ajoutait une pierre majeure dans son parachèvement. en instituant les établissements privés sous contrats, financés par l'Etat et que Michel Debré affirmait  "comme l'expression d'une liberté essentielle".

 

 

La fusion public/privé, un vieux débat.

 

En 1984, le gouvernement Mauroy chutait sur la réforme du système scolaire d'Alain Savary, ministre de l'Education Nationale. Elle proposait l'intégration de l'école privée dans le système scolaire public au sein d'un grand Service Public Unifié et Laïque de L'Education Nationale (SPULEN).

 

Le Secrétariat National de l'Enseignement Catholique (SNEC), qui est l'un des services nationaux de la Conférences des Evêques de France et l'association des Parents d'élèves de l'Ecole Privée (UNAPEL), après avoir fait durer les négociations durant de longs mois, avaient fini par déclencher une mobilisation monstre à Paris.

Entre juin et décembre 1993, une loi dite "Bourg-Broc" est adoptée. Elle supprime toute limitation du financement des établissements privés, aggravant ainsi la loi Falloux. Elle est appuyée par le ministre de l'Education Nationale de l'époque, un certain François Bayrou.

 

Le 13 janvier 1994, l'article 2 est retoqué par le conseil Constitutionnel qui estime qu’un financement sans limitation des établissements privés par les collectivités territoriales est contraire au principe d'égalité et constituerait un risque pour l’école publique.

 

Le 16 janvier 1994, le CNAL, les partisans de l'école laïque, les syndicats, les partis de gauche organisent une puissante manifestation, rassemblant à Paris plus d'un million de manifestants pour la Défense de l'Ecole publique. On se souvient que certains n'ont jamais pu partir du point de départ...

Amélie Oudéa-Castera : Pourquoi ?
Amélie Oudéa-Castera : Pourquoi ?
Amélie Oudéa-Castera : Pourquoi ?

Vidée de sa substance (article 2) elle est néanmoins promulguée le 21 janvier !

 

Depuis, l'école avait été confrontée au port de signes ostensibles et à l'irruption dans le champ politique de l'islam radical et de sa stratégie de conquête.

 

La gaffe, si tant est qu'elle en soit une, de Madame Oudéa-Castéra redonne de la vigueur à la "guerre scolaire". 

 

La balle est maintenant dans le camp des deux têtes de l'Exécutif. Il n'est pas certain que la démission de la ministre suffise à faire rentrer le diable dans sa boite !

 

Gérard Contremoulin

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