10 Mar

Trump trahit les alliances historiques. La seule riposte : le réarmement européen.

Publié par Gérard Contremoulin - Catégories : #Europe et International

Trump, en trois coups de canif, a déchiré le contrat de confiance passé après la victoire des alliés de la dernière guerre mondiale.

Le premier coup de canif s'est produit lors de la réunion du Conseil de Sécurité de l'ONU le lundi 24 février 2025, où les USA et la Russie ont voté ensemble.

Cela n'était plus arrivé depuis la signature du pacte germano-soviétique, le 23 août 1939. C'était alors au sein de la SDN (Société des Nations), prédécesseur de l'ONU (Organisation des Nations Unies), les USA et l'URSS (à l'époque) avaient voté ensemble.

Un vote historique, où, à la surprise générale, les rapports de force internationaux ont été inversés, où le concept de paix a été cité d'une manière désincarné, où les agressions vécues par les populations ont été ignorées. Cette transgression historique sera suivie de bien d'autres...

Le deuxième coup de canif s'est produit dans le bureau ovale sous la forme d'un véritable guet-apens contre Volodymyr Zélensky, organisé par Trump et son vice-président JD Vance.

Cette séquence est édifiante. Le président ukrainien était sommé de signer un accord pour l'exploitation par les américains des terres rares qui abondent en Ukraine en remboursement des 350 milliards de dollars qu'un soit-disant "président stupide" (Jo Biden) avait accordé.

Le troisième coup de canif se produit dans la nuit du 3 au 4 mars, où Trump suspend avec effet immédiat les livraisons d'armes, pourtant déjà en partance vers l'Ukraine.

Et de son côté, en écho (?), Elon Musk "coupe" le canal de livraison des renseignements aériens fournis par Starlink. Et même s'il a dû ensuite rétropédaler, le mal était fait. Poutine et son aviation en ont d'ailleurs profité.

Trump est passé à l'Est !

Cette sentence sonne fort. Elle renvoie à celle de François Mitterrand : "le pacifisme est à l'ouest, les euro-missiles sont à l'Est".

Ces trois coups de canif, gravissimes, sont à marquer d'une pierre noire. Leurs conséquences ouvrent une nouvelle étape dans les rapports internationaux. Qui peut désormais maintenir sa confiance à un tel chef d'Etat, susceptible de changer d'orientation par un tweet ou par l'un des décrets qu'il a pris l'habitude de signer par centaines "pour faire une bonne télévision".

La fin de l'illusion pacifiste.

Avec la reconstruction des années 50-60 avec la puissante aide américaine, le développement de la guerre froide, la montée de la tension entre les USA et l'URSS, la naissante Europe s'est habituée à considérer que la paix pouvait être durable, voire ne plus parler de guerre, ou encore à ne plus vouloir les voir, là où elles se déroulaient.

La montée des pacifismes aidant, les nations ont progressivement fait passer à l'arrière plan les dépenses militaires et d'armement. La France a supprimé la conscription et s'est séparé de ses casernes.

Toutefois, elle a maintenu la force de dissuasion à un niveau opérationnel, de même que l'armement conventionnel et a développé le concept de défense spatiale. La loi pluriannuelle de programmation militaire à suivi cette perspective politique.

Réarmement de l'Europe.

Il faut reconnaître que nous devons à Trump d'avoir provoqué un sursaut salutaire et fait prendre conscience que les États-Unis, sous sa présidence, ne soutiendraient plus les démocraties européennes !

La préoccupation de défense revient au premier plan. Depuis une semaine, les principaux pays européens autour de la France, de l'Allemagne, de l'Italie et même de l'Angleterre parlent de défense européenne autour du plan de financement proposé par la présidente de la Commission, à hauteur de 800 milliards d'Euros !

Dans cette perspective politique de réactivation du concept de "force européenne autonome de défense", il faudra compter sur la Turquie, devenue spécialiste des drones. Et dans cette technologie, elle se retrouve alliée à l'Italie.

Sur le concept d'autonomie.

L'une des conséquences de l'illusion pacifiste est qu'aujourd'hui, nous sommes dépendant des USA dans nombre de domaines de production d'armes. Il faut rendre hommage au concept-clé d'indépendance nationale en matière de dissuasion nucléaire que nous devons au Général de Gaulle.

Aujourd'hui, le "sursaut européen" est un défi : transformer les économies des principaux pays européens et leurs alliés (Angleterre, Turquie (!)) en "économies de guerre". Biberonnés aux illusions "peace and love" soixante-huitardes, nombre de citoyens de ma génération répugnent à ce concept de "économie de guerre". Pourtant, la "Real politik" s'impose à nous.

La méthode de Donald Trump.

La seule - et unique- obsession de Trump est d'organiser les conditions de la traduction de cette antienne de la très conservatrice première ministre britannique Margaret Thatcher : "I want my money back !"

Outre cette sidérante séquence du bureau ovale, la méthode, toutefois, est différente. Pour Donald Trump et ses "vérités alternatives", seul le deal compte. La différence entre la vérité et le mensonge n'est pas dans le vrai et le faux mais dans ce qui est cru !

On assiste donc à une politique de saturation des médias, une thrombose de l'information. Décrets, déclarations, tweets, l'expression du Président occupe tout l'espace médiatique et conduit à une omnipotence de la parole trumpienne.

Cette méthode rejoint celle de Poutine.

Pour mémoire, dans les années trentes, le spécialiste de la communication nazie, Joseph Goebbels disait : "Si on répète un message assez longtemps, il devient vérité."

Les conséquences.

Au diable les accords internationaux et leurs "grands équilibres", au diable les alliances historiques nouées dans les moments graves de l'histoire.

L'idéologie libertarienne, celle de la loi du renard dans le poulailler, est la négation du droit international.

La Paix en Ukraine.

Poutine et Trump, les USA et la Russie, sont des alliés objectifs pour y rejouer un "petit Yalta à deux" : la division du monde entre la Russie et les USA !

Le guet-apens du bureau ovale, avec le très cynique "Vous n'avez pas les cartes", consistait à contraindre Zélensky à signer une reddition en rase campagne ou bien à se retrouver seul face à Poutine, n'a pas fonctionné.

Quelques jours plus tard, le président ukrainien revient vers Trump en acceptant les termes de la négociation. Les gens sensés ne pourront pas s'empêcher de penser aux pressions qu'il a probablement subi. Néanmoins, la guerre des communiqués, par les voies conventionnelles ou les autres, et qui font pression pour conduire Zélensky à récipiscence, n'ont pas obligé le président ukrainien à plier.

Puis, les réseaux sociaux autour des suppôts des protagonistes de cette agression, se sont déchaînés dans des opérations de "trolling".

Qu'ils sachent que nous les connaissons maintenant...

L'Honneur de la Démocratie, la défense des engagements sur les valeurs humanistes, Volodymyr Zelensky nous a offert l'exemple de l'un de ses plus fervents militants.