Nouvelle validation concordataire par le Conseil Constitutionnel !
La décision du Conseil Constitutionnel du 21 février de valider une nouvelle fois l'exception concordataire, se situe dans la logique juridique qu'il respecte, et avec lui le Conseil d'Etat : le principe de Séparation, pourtant clé de voûte de la Laïcité, n'est pas inscrit dans le bloc de constitutionnalité.
Dès lors, son tendon d'Achille, la loi de 1924 qui réintégre l’Alsace-Moselle dans la République, en maintenant le régime du Concordat dans ces départements, peut s'appliquer dans toutes ses dispositions.
C'est ainsi que le Monde.fr peut écrire :
Si le principe de laïcité inscrit dans la Constitution est "conforme à la conception française de la neutralité de l'Etat en matière religieuse", il n'a pas pour but de "remettre en cause des régimes particuliers qui demeuraient applicables sur certaines parties du territoire de la République", selon les membres du Conseil constitutionnel.
Fermé le ban !
Un redoutable pas de clerc.
L'Association APPEL (Association Pour la Promotion et l'Expansion de la Laïcité), qui a déposé une QPC (Question Prioritaire de Constitutionnalité) visant à faire déclarer contraire à la Constitution le paiement des ministres des cultes reconnus sur fonds publics, a perdu devant les "Sages" du Palais Royal et avec elle, une nouvelle fois, les partisans de la Laïcité !
Cette décision est une très mauvaise nouvelle et l'on devra probablement la porter au "crédit" (!) de cette association dont l'initiative se révèle être une faute stratégique majeure. On se perdra en conjectures sur les raisons de cette énorme bévue, il n'en reste pas moins vrai qu'aujourd'hui, les cartes sont sérieusement redistribuées en faveur des partisans de l'exception concordataire !
La constitutionnalisation, sérieusement compromise ?
Le seul moyen de remédier, avant cette décison, aurait été évidemment de constitutionnaliser les principes de la loi de 1905, comme s'y était engagé le candidat François Hollande, le 22 novembre 2011, au Grand Orient de France.
Mais, on a vite vu naître un débat où, dans un élan d'alliés objectifs, des constitutionnalistes émérites comme le professeur Didier Maus , des élus alsaciens-mosellans comme le Maire de Strasbourg, les représentants des cultes concernés, des associations pro-concordataires, venir expliquer en quoi une telle proposition était totalement inutile, illusoire, impossible ! Une mobilisation de plusieurs mois qui sera couronnée par les déclarations du ministre de l'Intérieur.
Certes une mobilisation des forces opposées à l'exception concordataire s'est également manifestée, composée, elle aussi d'associations, notamment à propos de l'existence du délit de blasphème dans le droit local, contre les propos du minstre de l'Intérieur, d'universitaires, le GODF qui avait pris position sur les propos de Manuel Valls...
De sorte qu'après cette mobilisation qui a, une nouvelle fois, exprimé un rapport de forces incertain, et sauf à manifester le courage politique qu'appelait de ses voeux Caroline Fourest, il existe une forte probabilité que l'on se retrouve dans une alternative du type : soit on constitutionnalise à la fois les principes de la loi de 1905 et leur exception concordataire, soit on laisse les choses en l'état !
Bonjour la perspective !
Et maintenant, que fait-on ?
Avec ce nouveau pas franchi, il va devenir urgent de reconsidérer les positions des uns et des autres pour envisager une analyse commune de la situation nouvelle...
Les obédiences maçonniques libérales et adogmatiques, qui ne s'étaient pas précédemment retrouvées sur la défense de cet objectif, vont-elles se reprendre et envisager une véritable coordination sur la laïcité ? Certes, elles ne sont pas toutes sur la même approche, raison de plus pour se retrouver autour de la table...
La famille des associations laïques réussira-t-elle à privilégier une réflexion commune malgré des désaccords parfois profonds, hérités de l'histoire ?
Comment ?
La tâche est urgente car le rapport des forces n'évolue pas dans le bon sens ! D'autant plus urgente qu'il y a beaucoup à faire pour construire entre les "forces laïques" un parole commune. C'est pourtant INDISPENSABLE.
Et cela passe par une mise à plat des positions respectives, l'identification des désaccords et la recherche, au milieu des oppositions, d'une voie médiane. Un parcours sur le pavé mosaïque en quelque sorte...
C'est là que l'urgence ne sera peut-être pas la même pour tous. Et ce serait une nouvelle cause de profonde désolation...
Gérard Contremoulin
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