L'espace public doit le rester, sans accaparement !
La célébration d'un culte sur l'espace public a fait, fait et fera encore couler beaucoup de salive, remplira des colonnes et des colonnes, papiers ou virtuelles. Mais il en va du respect d'un principe essentiel, le principe de la Liberté de Conscience !
C'est ainsi que les prières de la rue Myrrha dans le 18° arrondissement de Paris présentent ce caractère illicite, aux yeux de la loi de Séparation des églises et de l'Etat du 9 décembre 1905. Et j'ajoute : à juste titre !
Or, le titre de la loi est bien : loi de séparation "DES églises" et de l'Etat !
En juin dernier, la chaine privée "KTO", chaine catholique, a diffusé une émission sur l'ordination de 4 prêtres. Qu'une chaine catholique diffuse une cérémonie catholique, quoi de plus normal.
Mais le petit texte rédactionnel qui présente cette émission indique : "Au cours de cette grande célébration diocésaine, le cardinal André Vingt-Trois, archevêque de Paris, ordonne les nouveaux prêtres pour le diocèse de Paris. Ces ordinations sont célébrées au cours d'une messe solennelle à laquelle plus de 5000 fidèles participent. A cet effet, le parvis est aménagé avec 3500 places assises et un écran géant qui retransmet la célébration. Le parvis et l'intérieur de la cathédrale ne formeront alors plus qu'un seul et même espace liturgique, la cérémonie se déroulant en partie à l'extérieur et en partie à l'intérieur. Près de 500 prêtres seront assis dehors pendant les deux premières étapes de la célébration avant d'entrer en procession dans la cathédrale pour imposer les mains aux nouveaux prêtres."
Effectivement, comme vous pourrez en juger, l'espace public situé devant la cathédrale, le Parvis, qui appartient à la Ville de Paris et non à l'archevêché, est utilisé comme complément du lieu de culte qu'est la Cathédrale, l'ensemble formant "un seul et même espace liturgique" !!!...
Des écrans géants, (repérables, même si les cadreurs ont fait en sorte de les minorer à l'image) rediffusaient la partie intérieure de la cérémonie :
N'est-ce pas là, l'utilisation de l'espace public à des fins cultuelles, au même titre que les prières de la rue Myrrha... Pourquoi devrions-nous traiter différemment une religion plutôt qu'une autre ?
Non, il ne peut y avoir deux poids et deux mesures.
Les lieux de culte sont réservés aux célébrations qui rassemblent les croyants qui s'y rendent volontairement. Ils sont à l'intérieur, ce qui leur confère d'ailleurs de bonnes conditions autant de recueillement, de sérénité que de sécurité.
Une autre chose est de se retrouver au milieu d'une cérémonie cultuelle alors que l'on passe en tant que piéton à proximité. C'est le cas avec le Parvis de Notre Dame.
Pour celles ou ceux qui ne connaissent pas cet endroit, s'y trouvent l'hopital de l'Hotel-Dieu, la Préfecture de Police de Paris, la crypte archéologique du Parvis, les bouquinistes, la rue piétonne qui passe le long de la Cathédrale et qui fait le lien entre le Pont au Double et la rue d'Arcole,
juste à
cet endroit !
Du seul point de vue de l'exercice d'un culte, pourquoi protester contre les seuls musulmans de la rue Myrrha ?
C'est en considérant cette question que l'on peut mesurer l'énorme avantage qu'offre la loi du 9 décembre 1905 lorsqu'elle institue le principe de la Liberté de conscience. C'est-à-dire la possibilité pour toute femme, pour tout homme de croire, de ne pas croire ou de penser en dehors de toute référence à une transcendance ou à un acte de foi. Croire est d'abord et avant tout une affaire de conscience, donc une décision privée, intime. C'est à ce prix qu'elle est éminemment respectable. Et c'est à l'Etat et aux pouvoirs publics de garantir ce principe en restant INDIFFERENT à l'égard des religions, quelles qu'elles soient.
Gérard Contremoulin
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