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Écoutes de la NSA, reniement de Copé à propos du Mariage pour tous, insultes racistes contre
Christiane Taubira, refus de Brigitte Barèges d'accueillir des élèves à Montauban, le droit du sol remis en question,
A - Qu'y-t-il de commun entre ces faits ?
J'aurai tendance à trouver que, cette semaine, c’est le triomphe de l’hypocrisie institutionnelle, laquelle transcende
les clivages gauche droite !
La National Security Agency (NSA) inscrit son action dans les longues lignées des « nobles
objectifs » de toutes nations de la défense de leurs intérêts économiques et stratégiques. Et elle la réalise à l’échelle de la planète.
Néanmoins, la Raison d’État étendant son manteau protecteur sur des activités privées
qui le transforment en vague cache-sexe de l’espionite quotidienne. Au-delà d’une légitime protestation des atteintes à la vie privée, il faut prendre conscience de la toute puissance des
« grandes oreilles », toute puissance qui a –toujours – existé !
Le net a publié deux petit films vidéos qui montrent que Jean-François Copé a
varié
de position sur le mariage entre personnes du même sexe. Dans le premier, il déclare ne pas être
opposé aux mariages pour tous. Dans le second, il s’y oppose. Ce qui lui a valu une lettre sans équivoque de la présidente de « la manif pour
tous ».
À Angers, une manifestation organisée par les opposants à la loi sur le mariage pour tous a vu des
enfants prendre des initiatives racistes à la grande satisfaction apparente de leurs parents dont une adolescente de 12 ans qui lance : « une
banane pour la guenon » en joignant le geste à la parole !!!
Lorsque le Maire de Montauban s’entête à refuser l’inscription dans les
écoles de sa ville de jeunes enfants malgré les avis contraires des autorités départementales,
Brigitte Barèges défie les règles de la République qu’elle est chargée d’appliquer. N’en étant pas à son coup d’essai, on peut se
demander la raison pour laquelle elle peut continuer à se prévaloir d’une certaine appartenance humaniste et philosophique qu’elle bafoue ? D’autant que ses actes lui sont tellement
contraires qu’ils commencent à porter atteintes aux intérêts de son obédience !
Le droit du sol est un fondement de la Nation française. Jean-Dominique Reffait
trouve dans le sol français une valeur fondatrice, révélatrice, constructrice de la nationalité : « Sans le sol de France, l'identité française s'évapore. ». C’est une vieille antienne
de la droite extrême (1991 Giscard et l’immigration-invasion, 1993 Pasqua face à la
montée du FN, 2003 Le Pen, 2005 Baroin, 2010 la droite populaire, 2013 Copé) et la gauche est partagée ! Sarkozy, quant à lui, déclarera avec constance que « le droit du sol, c’est la France »…
B - Quels enseignements tirer de cette actualité ?
1/ Les technologies de l’information, aujourd’hui, révèlent les doubles
langages quasiment en temps réel. Il devient ridicule de bâtir une stratégie de l’action sur des informations qui seraient inconnues des autres partenaires. Le renseignement vise plus à
connaître l’ensemble des options de négociation face aux « partenaires » et à évaluer leur volonté d’aller « jusqu’au bout ». En fait cette folle accélération de la vie
n’oblige-t-elle pas à davantage encore d’authenticité pour ne pas se perdre ?
Le sort
réservé à Julian Assange et à Edward Snowden montre à quel point les États sont atterrés de savoir que le net peut désormais percer les « secrets » et impuissants à en rétablir les
conditions !
2/ La
défense de la vie privée est l’objet de multiples atteintes. La révélation de l’activité de la NSA montre, plus qu’elle ne révèle, la capacité des États à violer la vie privée
sous couvert de défense des intérêts stratégiques. Quant aux atteintes à la vie privée, on retombe dans le sempiternel débat vie privée-vie publique. Dans un contexte schizophrène, la frontière
est d’une extrême fragilité et la langue de bois d’une épaisseur certaine !
3/ L’Intérêt général défini nom comme la somme des
intérêts particuliers mais comme un intérêt « supérieur », celui de la République elle-même, ne peut pas légitimer les incursions systématiques dans la vie privée qui sont l’apanage
des régimes policiers ou totalitaires.
Notre société n’est pas celle des
« bisounours » nous dit-on souvent. Certes, mais est-ce une justification à la violation de la sphère privée ?
4/ Une société en crise est en proie à une grande
déstabilisation des équilibres qui l’ont construite. La nouvelle mise en cause du droit du sol s’intègre dans cette déstabilisation. L’histoire récente de notre République montre
qu’elle réapparaît simultanément à une médiatisation de l’immigration, présentée comme une menace. Hypocrisie majeure si l’on se souvient que l’arrivée en France de populations étrangères
venant notamment des anciens pays coloniaux français, a été institutionnalisée par le pouvoir (gaulliste) pour fournir de la main d’œuvre (à bon marché) au bâtiment et à la construction
automobile. Le droit du sol est fondateur de l’identité française, il est le socle de notre système politique républicain. Comprendre cela n’oblige-t-il pas d’abord à développer l’exercice du
libre arbitre pour démêler le réel du faux-semblant ?
5/ Une adolescente qui crie une injure raciste à peine une semaine après
le montage photo et l’interview intolérables d’Anne Sophie Leclère, candidate « sanctionnée » du FN aux municipales. Parents qui se réjouissent des propos de leurs enfants, parti qui
vit sur le double langage et la duplicité en permanence. Voilà des situations, des attitudes sociales qui prolongent la dégradation du respect mutuel que j’évoquais la semaine dernière en y
ajoutant l’hypocrisie.
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Comment peut-on admettre de tels débordements, particulièrement lorsqu’ils se
développent dans la perspective d’élections dont chacun s’accorde à penser qu’elles pourraient constituer un enjeu majeur ? Sur le plan politique, ce n’est pas contestable. Sur le plan
moral, c’est tout à fait autre chose. Cette dégradation est aussi un enjeu majeur, qui passe malheureusement loin derrière.
Peut-on imaginer qu’une société qui aurait perdu les raisons qui lui ont permis de se construire, puisse se
développer ? Bien évidemment non.
Et c’est là qu’il paraîtrait souhaitable que les humanistes s’investissent dans les différentes organisations sociales
qui « animent », qui font vivre notre société républicaine. Faute de cela, leur place sera inéluctablement occupée par leurs adversaires et la République dépérira. Comme cela s’est
déjà déroulé dans le passé…
Une semaine où nous pourrions trouver matière à approfondir la force de nos convictions…
Gérard Contremoulin
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