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Le Blog pour Tous d'un franc-maçon. "La loi morale au fond de notre coeur et la voute étoilée au dessus de notre tête". Emmanuel Kant Les pseudonymes ne sont plus acceptés pour les commentaires. (4.11.2018)

22 Jun

Raison, progrès, science et postmodernisme.

Publié par Sous la Voûte étoilée  - Catégories :  #Réflexions, #Valeurs républicaines

Ricardo Bofill - Les espaces d'Abraxas -  Noisy-le-Grand

Ricardo Bofill - Les espaces d'Abraxas - Noisy-le-Grand

 

La sortie de crise se révèlera-t-elle comme un essor des pseudo-sciences, comme l'affirmation d'un postmodernisme, ennemi des concepts de raison et de  progrès ? 

 

Le concept de progrès, cher aux philosophes des Lumières, de Descartes à Kant, est la cible des postmodernes, quelles que soient leurs disciplines.

 

Qu'entend-on par postmodernisme ?

 

 

 

Nouvel essor d'un obscurantisme rétrograde ou détournement calculé ?

 

 

Les "Néoconservateurs".

 

La philosophe Juliette Grange[1]a décrit le travail de sape auquel se livre ce mouvement dans son ouvrage :  "Les Néoconservateurs". Pour elle, ils mènent l'offensive, à partir des USA, depuis une quarantaine d'années. 

 

 

Pour elle :

 

"La société française a beaucoup évolué ces dernières décennies en matière de moeurs et de valeurs. Mais le désarroi qui la frappe la rend plus sensible à une nouvelle présentation d'idées anciennes qui tentent de réinvestir le débat intellectuel.

 

Depuis les années 2000, des groupes jusqu'alors discrets (Ichtus, Institut Montaigne, Opus Dei) ciblent le "grand public éclairé" (NDLR : les chercheurs, les universitaires, les médias) en faisant croire que les idées passéistes et réactionnaires, voire fantaisistes, sont l'objet des recherches les plus sérieuses.»

 

Ces groupes veulent démontrer que la République, empreinte d’humanisme laïque, ne peut plus être la bonne réponse aux besoins de la société.

 

C’est pendant cette période que le sociologue Michel Maffésoli commence à publier ses thèses sur la « postmodernité ». Mais, c’est surtout dans « La France étroite » (2015), qu’il développe ce qu’il entend par « le retour des tribus » et considère le concept d’unité nationale comme « vieillot ». Son analyse contribue à la destruction de l’unité de la République au profit d’une république des communautés. 

 

Au cours de cette période, un certain politiquement correct d'une intelligentsia de gauche va s'employer à vendre la Laïcité à la découpe en l'affublant d'adjectifs (ouverte, plurielle, apaisée), tel Jean Baubérot. Ou encore elle s'appliquera à légitimer les mouvements sectaires rebaptisés "minorités de conviction" par Bruno Etienne ou Raphaël Liogier.

 

Ces intellectuels ont en commun d'être sociologues et/ou philosophes, étudiant ou ayant étudié les religions.

 

 

Sans pouvoir toujours identifier les phénomènes qui traversent notre société, nous constatons un travail de mise en cause radicale et systématique des fondements même de la philosophie des Lumières. 

 

Au XVIII° siècle, elle avaient fait émerger la Raison comme l'outil essentiel de l'émancipation. Le « Sapere Aude » d’Emmanuel Kant, devenait la règle d'or : « Aie le courage de te servir de ton propre entendement ». 

 

Aujourd’hui, cette philosophie humaniste est contestée. Depuis une quarantaine d'années, elle est attaquée par une vague obscurantiste où se mêlent haine, xénophobie, antisémitisme, populisme et démagogie. 

 

Quelles que soient leurs acteurs, qu'ils aient été liés aux mouvements La Manif pour Tous, Le Printemps Français, la mouvance d'Alain Soral ou encore les Identitaires ou qu'ils soient plus récemment liés aux mouvements populistes en Europe (Italie de Bepe Grillo, Hongrie, Turquie, Pologne, Autriche) et dans le monde (USA, Brésil), la cible est toujours la même : les principes de la philosophie des Lumières.

 

 

De renoncements en acceptations sur fond de "politiquement correct”, voire de tolérance, nous nous sommes habitués à laisser se développer des thèses obscurantistes (les sectes), à laisser le religieux empiéter sur le domaine des sciences (créationnisme). De sorte qu’un phénomène de dé-Raison obère toute réflexion.

 

Impostures intellectuelles.

 

En 1997, Jean Bricmont et Alan Sokal avaient publié un ouvrage sous ce titre qui leur valu d'être surnommés les deux "mousquetaires de la Raison". Vingt ans après, ils valident leur analyse du postmodernisme comme créateur de la politique de l'identité. "L'humanité est divisée en catégories, en groupes : les hommes, les femmes, les blancs, les noirs, les homosexuels, etc. Chacune de ces catégories a sa vision du monde propre et qui est intrinsèque à son identité. Et ces visions du monde sont incommunicables n'ayant pas de terrain commun. Ce qui empêche toute communication entre les êtres humains." Selon une formule de Jean Bricmont, "Le postmodernisme, c'est l'idéalisme plus la décolonisation". La vidéo développe ce thème.

 

On y retrouve aussi, à partir de 12'15"", l'étude-canular montée par un fictif Jean-Pierre Tremblay contre Michel Maffésoli, intitulée "Automobilité postmoderne, quand l'Autolib fait sensation à Paris". Après sa publication dans la revue Sociétés, dirigée par Michel Maffesoli, Manuel Quinon et Arnaud Saint-Martin, deux étudiants et véritables auteurs, révèleront eux-mêmes ce canular dans un article titré : "Le Maffesolisme, une sociologie "en roue libre" : démonstration par l'absurde".

 

 

Les principes du post modernisme.

 

Dans cette petite vidéo Mos Majorum sur le site "Tipeee" aborde la relation entre les constructions sociales et la philosophie postmoderne.

 

Il développe deux principes du postmodernisme :

Le postmodernisme pose le postulat que la Raison n'existe pas et conteste la notion de vérité objective

Le postmodernisme développe cette idée que la vérité résulte du pouvoir et se construit par le biais du symbole, de la narration et du langage.

 

Pour le post modernisme, la raison et la vérité n'existent pas.


 

 

Où l'on retrouve le professeur Didier Raoult.

 

Celui dont la polémique ouverte par le pseudo-débat sur l'Hydroxychloroquine a fait des ravages dans les consciences. En quelques jours, on a vu fleurir sur les réseaux sociaux des nuées de nouveaux virologues, épidémiologistes, spécialistes des maladies tropicales.

 

Alors que l'élémentaire prudence aurait voulu que l'on attende les résultats des essais cliniques, menés en double aveugle, on est quasiment arrivé à ce que son autorisation de mise sur le marché (AMM) soit décidée par acclamation, au nombre de "likes" facebookiens ou à un je-ne-sais-quel "Top Chef"..

 

 

 

Dans son livre De l’ignorance et de l’aveuglement. Pour une science postmoderne″, le professeur Didier Raoult affirme sa conviction que la science doit être "postmoderne".

 

 

L'illustration qui orne la couverture annonce nettement la couleur. Darwin est sur la sellette. La littérature créationniste s'est abondamment acharnée contre la théorie de l'Evolution en commettant des anachronismes effarants issus d'une lecture littérale de la Bible selon laquelle le monde a été créé, tel qu'il est aujourd'hui, en 6 jours. Curieux ce choix de voisinage du professeur Raoult.

 

CQFD.

 

Nous avions découvert cela dans les échanges que j'ai eu l'occasion d'avoir avec Michel Maffesoli (ici, ici) et particulièrement dans le dialogue réalisé avec lui sur le thème "Unité de la République ou République des communautés" pour la revue Spirale (septembre 2018).

 

Mais ce qui fait écho, dangereusement, aux propos racialistes qui font florès actuellement, y compris à gauche, c'est d'entendre  en quoi le postmodernisme considère que la vérité est forcément contestable, notamment dans le domaine des sciences. Et bien, c'est parce qu'elle ne serait que le résultat de la volonté d'imposer un point de vue, celui de l'homme blanc, le "phallogocentrisme" de Jacques Derrida.

 

"Et voilà pourquoi votre fille est muette !"

comme dirait le Sganarelle du "Médecin malgré lui" de Molière. 

 

 


[1] Agrégée de philosophie, docteur d’État, enseignante à l’université François Rabelais de Tours. Auteure de « Les Néoconservateurs », Edition Pocket, Agora Oct. 2017.

 

 

 

Gérard Contremoulin

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