Laïcité : Vincent Feltesse et la loi de 1905...
La réserve parlementaire, que chaque député peut utiliser pour aider des projets sur sa circonscription est de l'argent public. Vincent Feltesse a choisi d'en réserver 50.000 € pour contribuer au financement d'une Mosquée. Le fait-il en contradiction avec l'article 2 de la Loi de 1905 ?
La réserve parlementaire est constituée d'argent public provenant du budget de l'Etat, affecté à l'Assemblée Nationale. Par conséquent, Vincent Feltesse, député de Gironde et maire de Blanquefort, s'expose, en utilisant cette source pour subventionner un lieu de culte, au reproche de viol de l'article 2 de la loi du 9 décembre 1905 qui stipule : "L'Etat ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte".
Pour respecter la loi, il choisit de répartir son aide financière sur plusieurs structures participantes au projet et précise qu'il s'agit de cofinancer une étude préalable de cet édifice qui comprendra une bibliothèque. Tiens, cela a un air de déjà-vu... Déjà, Jack Lang, alors ministre, avait accordé une subvention de son ministère (la Culture) au financement de la "bibliothèque" de la Cathédrale d'Evry, alors en construction... Des esprits chagrins pourraient voir là, purement et simplement, une contribution de fonds publics à la réalisation d'un édifice religieux...
D'autant qu'il ajoute, mais la bonne conscience ne semble pas d'un prix excessif aujourd'hui (!), "que cela vaut le coup d’aider ces démarches-là, et d’ouvrir ce débat."
Cela fera bientôt 30 ans que le débat est posé très officiellement parmi les élus et les politiques. De sorte que l'on ne peut s'empêcher de penser que chaque fois qu'un élu choisit d'accorder un financement public pour un lieu de culte, il apporte sa propre contribution à ce débat. Et le plus souvent cette contribution est tout simplement le viol de la loi, sans avoir d'ailleurs le courage de le porter là où il devrait l'être : au Parlement...
La question de fond à traiter.
Elle est d'importance puisqu'il s'agit de réfléchir et de décider comment permettre la pratique du culte musulman. Et ses fidèles auraient raison d'en appeler au respect de l'article 1 de la loi : "l'Etat garantit le libre exercice des cultes". Ce libre exercice suppose l'existence de lieux de cultes. Or ceux-ci n'existent pas ou sont particulièrement vétustes, donc dangereux !
Quelles solutions trouver à cette situation, dans le respect de la loi, autres que celles contenues dans les 5 décisions du Conseil d'Etat de juillet 2012, quasiment toutes dérogatoires.
Elles sont de deux types : la construction et, dans une moindre mesure, la location.
Si l'on veut s'en tenir au respect du principe républicain, et particulièrement de ses articles 1 et 2 ci-dessus, rien n'interdit la mise en place de structures de financement permettant l'identification des fonds reçus. Par exemple la forme associative sur le modèle du financement de la vie politique où l'Etat, par ses représentants, peut s'assurer de la provenance des fonds, limitant par exemple les apports de pays étrangers.
Une solution a été élaborée dans le 18° arrondissement pour mettre fin aux prières de rue de la rue Myrha. Confronté à l'occupation de l'espace publique de sa commune, le maire du 18°, Daniel Vaillant, a élaboré une solution globale, basée sur la construction d'un édifice (l'Institut des Cultures d'Islam - ICI). La puissance publique (en l'occurrence la Mairie de Paris) a pris l'initiative de construire cet ensemble, bien entendu sur fonds publics dans un premier temps, puis les espaces consacrés à l'exercice du culte seront revendus à des associations cultuelles, établies selon la loi de 1905. Chaque association cultuelle remboursera alors à la collectivité publique le prix de son lieu de culte.
Ces deux exemples montrent la complexité de cette question mais surtout la possibilité qui existe de construire des lieux de cultes, principalement musulman aujourd'hui, sans que cela grève durablement les fonds publics. Il ne s'agit donc pas de trouver dans la constitution d'associations culturelles (loi de 1901) la possibilité de contourner la loi mais de se baser précisément sur son respect par la vente à des associations cultuelles (loi de 1905) de tels lieux de cultes.
Reste que dans le cadre de la loi existante, il ne serait probablement pas inutile de prendre des dispositions réglementaires ad equat s'imposant à toutes les composantes de la puissance publique (Etat, collectivités territoriales et établissements publics).
Il ne s'agit donc pas de trouver des moyens pour contourner la loi (comme on a eu trop souvent l'occasion de le constater) mais, à l'inverse, d'en utiliser toutes les dispositions pour la respecter !
Gérard Contremoulin
_____________________________________________________________