V comme Visite
En franc-maçonnerie, visiter, c'est-à-dire assister aux travaux maçonniques d'une autre entité que celle dont vous êtes membre, est une expérience riche en découvertes.
On en fait parfois de surprenantes. Dans la quasi totalité des cas, c'est dans le bon sens du terme. Particulièrement lorsque leur teneur vous enrichit et vous "rend content", comme on le dit dans le rituel pratiqué au Droit Humain.
C'est le cas lorsque l'Apprenti participe aux travaux d'une autre loge que celle dans laquelle il a été reçu et y découvre une autre manière de faire, une autre "culture", une autre manière d'aborder les problématiques posées aux maçons. Et pourtant, dans les grades bleus (les 3 premiers grades), le rituel est comparable, les éléments rituéliques sont identiques... C'est une bonne expérience pour l'apprentissage et la compréhension du travail maçonnique.
C'est le cas du Compagnon dont l'un des points essentiels du cheminement (beaucoup plus que chez l'Apprenti) est le voyage et la découverte. Il tirera largement profit de la comparaison des pratiques du rituel à son grade et les particularités des rites. C'est pour lui, notamment, l'un des meilleurs exemples de la caractéristique du grade, dont on me pardonnera ici de rester dans le "flou".
Dans ces cas, la visite est un acte bénéfique, indispensable dans le cheminement initiatique. Elle permet d'acquérir une vision transversale de la maçonnerie, riche des différences que le maçon pourra assimiler et synthétiser dans sa manière de "maçonner". Sa capacité de transmettre, lorsque le moment sera venu, n'en sera que plus efficiente.
Mais ce n'est pas toujours sans risque...
La visite peut aussi réserver des surprises plus ... étonnantes. Particulièrement lorsque vous assistez, avec une certaine stupéfaction, à l'expression de la nature humaine dans toute sa désagréable réalité !
Ce n'est pas en franc-maçonnerie que l'on peut s'attendre à être confronté à l'injustice flagrante, au mépris du travail fait. C'est encore plus flagrant lorsque, le même jour, plusieurs travaux sont présentés et soumis au vote pour le passage de grade ! Mais, cerise sur le gateau, le vote est favorable aux travaux présentés au nom de leurs auteurs, absents ! C'est d'autant plus maladroit de la part des responsables de l'ordre du jour que ce type de présentation rend la comparaison inévitable.
Travailler à la recherche de la vérité, à la pratique de la solidarité et, dans le même temps, manifester sans sourciller l'inégalité de traitement des candidats, justifier cette manière de procéder au nom du développement de la maçonnerie tient de l'équilibrisme le plus dangereux. A tout le moins ce grand écart rend douloureux les adducteurs !
Et, nectar des nectars, ambroisie des ambroisies, il est fait appel à l'application de LA Règle. Véritable sauf-conduit des faibles, cache sexe accompli des hypocrisies, paravents des pratiques autoristaristes (pour rester fraternel), LA Règle permet de taire ses réelles opinions en donnant publiquement le change. Dans le fonctionnement politique ou syndical, ce type de recours est malheureusement courant. En maçonnerie, c'est révoltant. Et pourtant... j'en ai été malheureusement récemment le témoin.
Je souhaite beaucoup de courage et d'abnégation aux membres de cette entité que j'ai eu la mauvaise idée de "visiter". On ne m'y reprendra pas. J'ai peu de gout pour les mauvais remakes de pratiques d'un autre âge. Mais, si l'on se souvient que ces remakes ont quasiment tous périclité, on peut caresser l'espoir que là aussi l'endarkenment pourra être vaincu !
Gérard Contremoulin
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